Standing Rock (Etats-Unis):

Ecologisme contre lutte de classe

(«le prolétaire»; N° 523; Février-Mars-Avril 2017)

Retour sommaires

 

 

Fin décembre 2016, les écologistes et une grande partie de l’«extrême» gauche ont célébré la «victoire» des Sioux du Dakota du Nord qui ont empêché, grâce à une mobilisation de plusieurs mois et malgré une répression brutale, la construction d’un oléoduc – le Dakota Access Pipeline (DAPL) – qui devait traverser leurs terres.

Cette «victoire» a été de très courte durée. Donald Trump avait promis de revenir sur la décision d’Obama, dans les derniers jours de son administration, de s’opposer à la construction de ce pipeline: chose faite dès les premiers jours de mandat du nouveau président. Rien d’étonnant: Trump possède des actions dans Energy Transfer Partners (ETP), l’entreprise qui construit l’oléoduc, et il compte parmi ses plus proches alliés un magnat du pétrole de schiste.

En quelques jours, le pouvoir fédéral et l’État du Dakota ont mobilisé tout l’arsenal répressif possible – flics, militaires et juges – pour expulser les militants Sioux et écologistes qui occupaient le site. Le 23 février, les derniers présents ont évacué la zone en mettant le feu à leur campement.

Pour les populations amérindiennes, ce combat allait au-delà du refus d’être exposés aux risques inhérents au projet et était également une forme de résistance face à la brutale oppression raciste que subissent les Amérindiens depuis des siècles. Ces populations sont durement frappées par le chômage, la misère et tous les maux qui les accompagnent. Par exemple, à Pine Ridge (Dakota du Sud), 80 à 90 % de la population est sans emploi, et l’espérance de vie est autour de 50 ans, soit moins que dans la plupart des pays d’Afrique!

La construction du DAPL est une conséquence du «boom pétrolier» que connaît le Dakota du Nord avec l’exploitation du pétrole de schiste. Il y a une décennie, l’économie de cet État peuplé de seulement 750 000 habitants (contre 39 millions pour la Californie ou 27 millions pour le Texas), était dominée par les activités agricoles (production de blé dur, de haricots, de lin, de betteraves à sucre…). Son industrie était faiblement développée avec seulement quelques secteurs comme la production d’hydro-électricité, l’agro-alimentaire et des mines de lignite.

Aujourd’hui, le Dakota du Nord est devenu le deuxième État producteur de pétrole après le Texas. La principale région productrice, le bassin de Bakken, a vu sa production quintupler entre 2010 et 2016. Cela a entraîné une très forte croissance démographique et économique. Sa croissance économique annuelle est supérieure à 15 % et le chômage est le plus faible des Etats-Unis (1%). Le «revenu par habitant» – qui mesure le degré de développement capitaliste et non la richesse des habitants – a augmenté de 20% : il est passé du 39e rang (sur 51 Etats) en 2000 au 5e en 2012. Les territoires dans lesquels les hydrocarbures sont exploités ont vu leur population croître de plus de 25 %.

Les ressources en hydrocarbures ont été exploitées de façon totalement anarchique et sans se soucier de la santé et de la sécurité des prolétaires et des populations. Rien de surprenant, c’est inhérent au capitalisme!

70 millions de litres de pétrole, de gaz ou de produits chimiques divers ont été ainsi déversés au Dakota du Nord entre 2006 et 2014, à la suite de 8700 accidents. Ces milliers de déversements ont eu d’immenses impacts en contaminant l’air, le sol et les nappes phréatiques. A cela s’ajoute le risque que les produits chimiques utilisés pour la fracturation hydraulique ne migrent progressivement dans le réseau d’eau et aussi les pollutions liées à la «réinjection» souterraine des eaux usées issues de la fracturation (le plus souvent dans les régions pauvres et peuplées de Noirs). Ce genre d’événements choque et révolte avec raison les écologistes ou les «écosocialistes» en tout genre.

Mais ils s’indignent moins du calvaire que vivent les prolétaires exploités par l’industrie pétrolière. Les accidents du travail atteignent des taux gigantesques au Dakota du Nord: 104 pour 100 000 salariés pour l’extraction de pétrole (la moyenne nationale est de 16) et 97 pour 100 000 dans la construction (9 au niveau national). Les accidents mortels – doux euphémisme pour parler de meurtres capitalistes – sont également cinq fois plus nombreux que la moyenne nationale et ils sont en très forte hausse depuis 2007 (ils sont passés de 7 pour 100 000 à 18, soit de 25 à 65 morts par an).

Ils sont également moins révoltés par les risques énormes que font courir aux quartiers ouvriers les trains chargés d’hydrocarbures, souvent de plus d’un kilomètre de long, qui les traversent. De grandes villes étasuniennes, comme Buffalo ou Minneapolis, sont traversées par ces véritables trains de la mort, comme l’a montré «l’accident» au Canada de Lac-Mégantic en 2013, au cours duquel l’explosion de nombreux wagons chargés de pétrole a tué 47 personnes; l’équipage de ce train qui avait traversé les deux plus grandes villes canadiennes était constitué d’une seule personne, le conducteur – qui a servi de bouc-émissaire pour la catastrophe. Le transport de matières dangereuses sur rail ou sur route est un facteur de risque beaucoup plus grand que les oléoducs et gazoducs. Les autorités étasuniennes font silence sur le sujet mais leurs homologues canadiens ont reconnu que les trains de pétrole déclenchent un incendie tous les trois jours en Ontario.

De plus, les routes du Dakota du Nord sont devenues les plus dangereuses du pays: elles sont sillonnées par des flots de camions chargés de matériaux, de sable ou d’eau pour la fracturation hydraulique.

Les groupes écologistes ou «écosocialistes» qui ont combattu le projet d’oléoduc ont un point de vue bourgeois; ils souhaitent réformer le capitalisme pour le «verdir», l’assagir, et le rendre ainsi plus «humain» et plus «durable». Ils nient complètement que le problème n’est ni l’utilisation d’énergies fossiles ni la fracturation hydraulique ni le transport par oléoducs, mais le capitalisme lui-même et sa folle course au profit.

Au contraire des communistes, beaucoup d’écologistes – avec souvent le soutien de leurs suivistes d’«extrême» gauche comme Socialist Alternative ou l’ISO qui ont fait campagne pour la candidate du Parti Vert à la présidentielle – n’ont rien d’autre à proposer qu’un utopique et réactionnaire retour en arrière, avant l’industrialisation, avec l’objectif d’orienter le capitalisme, non vers la satisfaction des marchés, mais vers la satisfaction des besoins humains.

Tout cela est une complète utopie. Le capitalisme est fondé sur l’exploitation des prolétaires pour produire du profit, il ne peut fonctionner différemment; «Quant à attendre du mode de production capitaliste une autre répartition des produits, ce serait demander aux électrodes d’une batterie qu’elles ne décomposent pas l’eau et qu’elles ne développent pas de l’oxygène au pôle positif et de l’hydrogène au pôle négatif alors qu’elles sont branchées sur la batterie» ajoutait Engels dans son ouvrage «L’Anti-Duhring».

Le chemin de la transformation sociale et donc économique de la société bourgeoise ne peut que passer par la lutte révolutionnaire contre le capitalisme ; cette lutte révolutionnaire ne peut être menée que par ceux qui n’ont aucun intérêt à la survie du capitalisme: les prolétaires. Ce combat contre la classe dominante pour détruire sa domination politique – qui lui sert à préserver le mode de production capitaliste – devra aboutir à l’instauration de la dictature du prolétariat qui est nécessaire pour briser la résistance des bourgeois et déraciner de fond en comble le capitalisme.

La seule alternative non illusoire est la préparation de la révolution prolétarienne sous la direction du parti communiste mondial.

A la différence des «écosocialistes» qui revendiquent «Laissez les énergies fossiles dans le sous-sol! 100 % renouvelables dès maintenant!», les communistes proclament:

 

Enterrez le capitalisme!

100 % pour une société sans classes qui en finisse avec le joug de l’esclavage salarié!

100 % pour le communisme, un monde nouveau qui satisfasse les besoins de l’Humanité toute entière!

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

Retour sommaires

Top