Mexique: grèves sauvages dans les ateliers de misère

(«le prolétaire»; N° 532; Février - Mai 2019)

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La zone frontalière mexicaine qui jouxte les Etats-Unis est un paradis pour les exploiteurs. Depuis quelques décennies, cet espace a vu se développer des «maquiladoras», c’est-à-dire des usines de montage exemptées de droits de douane et faiblement taxées qui fabriquent pour des multinationales des pays impérialistes des productions qui seront expédiées vers ceux-ci.

Dans les maquiladoras, l’exploitation est féroce. Les ouvriers travaillent pour des salaires de misère jusqu’à douze heures par jour et six jours sur sept. Ils sont fliqués et peuvent difficilement quitter les chaînes de montage pour aller aux toilettes ce qui les oblige à peu boire malgré la chaleur. Ces usines sont également des lieux où les violences contre les femmes (qui forment souvent la majorité de la main d’oeuvre) sont très fréquentes avec de multiples cas de harcèlement sexuel par les petits chefs.

Au total, on estime qu’un million de travailleurs sont exploités dans trois mille de ces bagnes capitalistes et produisent les deux tiers des exportations mexicaines.

Fin janvier et début février, des maquiladoras ont été le théâtre d’une bataille de classe contre les salaires de misère.

Dans le cadre de la disparition de l’ALENA (Accord de Libre-Echange Nord-Américain) et de son remplacement par un nouveau traité entre le Mexique, les Etats-Unis et le Canada (T-MEC), les puissances impérialistes ont imposé au Mexique une augmentation des salaires pour limiter la désindustrialisation causée par les délocalisations. C’est à la suite de cet accord que le nouveau président mexicain, de centre-gauche Lopez Obrador, a pris la décision de doubler le salaire minimum dans la «zone de la frontière Nord» qui borde les Etats-Unis sur une profondeur de vingt-cinq kilomètres: de 88 pesos à 176 pesos par jour (soit de 4 euros à 8 euros).

Mais en réalité, ce doublement s’est traduit par un gel ou à peine une légère augmentation des salaires!

Cela s’explique d’une part par le fait que dans beaucoup de maquiladoras le salaire se situait déjà entre 155 et 176 pesos; et d’autre part que les patrons – qui en échange de la mesure avaient obtenu des exonérations d’impôts – ont supprimé de multiples avantages qui existaient sous forme de primes.

C’est ce qui a mis le feu aux poudres dans la ville de Matamoros. Des grèves sauvages – contre les patrons mais aussi contre les syndicats jaunes – ont éclaté dans les usines électroniques et automobiles (y compris des sous-traitants de Ford, Fiat et General Motors).

La grève s’est étendue très rapidement car les ouvriers se sont organisés avec des assemblées de grévistes et des piquets de grève, et ils ont fait une tournée des autres usines pour étendre les débrayages. En quelques jours, soixante-dix mille travailleurs étaient en grève dans quarante-cinq maquiladoras.

Face à la grève, les patrons ont, de façon classique, utilisé la répression et le chantage à la fermeture des usines. Mais cela n’a pas fonctionné et les patrons ont rapidement fait leur compte: chaque journée de grève leur faisait perdre près de cinquante millions de dollars. La lutte coûtait ainsi cher aux capitalistes étasuniens tellement sont importants et vitaux les liens qui unissent le Mexique avec les Etats-Unis.

Le patronat a donc été contraint de ravaler sa morgue et de céder aux revendications des prolétaires: vingt pour cent d’augmentation immédiate et une prime de près de mille cinq cents euros.

Ce recul des patrons a eu un effet d’entraînement sur d’autres prolétaires qui se sont massivement mis en grève dans des supermarchés, dans l’usine Coca-Cola, dans les services de ramassage d’ordures, parmi les enseignants. Début mars des dizaines d’usines étaient encore en grève (les 700 ouvriers de Coca Cola en étaient à plus de 30 jours de grève)....

Les prolétaires ont fait la démonstration que la lutte ouverte sur un terrain de classe pouvait être victorieuse. Ils ont refusé les manœuvres des syndicats jaunes, l’obéissance aux règlements bourgeois (qui statuent si une grève est légale ou non) et le chantage patronal. Ils ont compté sur leur mobilisation et sur l’extension de la grève pour unir les prolétaires au-delà des murs de «leur» usine.

Union des prolétaires par l’extension de la grève et défense de leurs conditions de vie contre les intérêts de l’entreprise et de l’économie nationale, voilà des bases essentielles et indispensables pour mener la lutte et pour la gagner.

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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