«Acte deux du quinquennat» :

énième acte des attaques anti-ouvrières

(«le prolétaire»; N° 534; Septembre - Octobre 2019)

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La «réforme» des retraites engagée en cette rentrée (lire l’attaque contre les retraites) serait, paraît-il, la plus importante réforme du quinquennat Macron, et, selon les médias, elle serait «explosive». Au point que certains politiciens de la majorité auraient plaidé pour qu’elle soit différée ou amortie. Dans tous les pays ou presque la question des retraites voit les bourgeois à l’offensive contre ce qui avait été autrefois concédé aux travailleurs, et la France ne fait pas exception.

 Le gouvernement Philippe-Macron, s’appuyant sur le fait que les mesures antisociales du gouvernement Hollande (loi El Khomri, etc.) étaient en définitive passées sans trop de difficultés, avait décidé dès le début d’accélérer le rythme des attaques, sans s’embarrasser de discuter avec les véritables pompiers sociaux que sont les dirigeants syndicaux; il savait parfaitement que, complètement intégrés dans les mailles du réseau bourgeois de collaboration de classe, les grands appareils syndicaux ne peuvent opposer de résistance aux pressions qui émanent du pouvoir.

Adversaires résolus de la lutte de classe prolétarienne, quand ils mobilisent les travailleurs, c’est pour mieux les détourner de la lutte réelle et préserver le statu quo économique et social. C’est ce qu’ils ont continué à faire sous Macron comme auparavant, même si c’est en ronchonnant (1).

Mais l’épisode «Gilets Jaunes» s’est mis en travers de la belle mécanique. Indépendamment des orientations politiques inévitablement dominantes dans ce mouvement interclassiste, sa puissance initiale et sa durée ont démontré la force des tensions qui s’accumulent dans le sous-sol social. Le gouvernement a dû battre en retraite; en usant à la fois de la répression policière et de l’opium démocratique, il a pu reprendre le contrôle d’une situation qui semblait lui échapper à la fin de l’année dernière, cependant l’alerte a été chaude.

La situation n’était certes pas sur le point de devenir révolutionnaire, mais le risque de la contagion de l’insubordination à une classe ouvrière jusque-là paralysée face aux attaques, était ce qui inquiétait le gouvernement.

Il en a tiré quelques leçons; et il claironne maintenant que l’ «acte deux» du quinquennat sera différent. Non qu’il renonce aux «réformes», comme on le voit, de cela il n’est pas question. Il s’agit de faire en sorte que les attaques demandées par les capitalistes soient réalisées de façon à ne provoquer qu’un minimum de réactions prolétariennes.

 

Macron surveille de près le chaudron social

 

C’est sous ce titre que Le Monde résume l’attitude gouvernementale (2) en rapportant que selon l’«entourage» du président, «cela s’allume partout sur le tableau de bord» social. Ce que craignent les responsables gouvernementaux, selon le quotidien, ce sont «les éruptions de colère spontanée qui ne seraient pas maîtrisées par les syndicats» «Dans le climat actuel de défiance généralisée à l’égard de tout ce qui est institutionnel, on peut craindre que cela légitime la création de collectifs autonomes diffus et sans contrôle», s’inquiète ainsi une secrétaire d’Etat auprès du journal.

Le gouvernement a donc décidé d’étaler dans le temps certaines attaques, comme celle contre les retraites, selon un calendrier de plusieurs mois qui a reçu l’aval du MEDEF. Pendant cette période des «consultations» des syndicats auront lieu. Mais affirme le Premier Ministre (3), le cadre de la réforme est déjà fixé. Autant dire que ces consultations ne serviront qu’à préparer le terrain pour l’attaque, avec l’aide des directions syndicales.

Ces dernières ont en effet fait la preuve de leur utilité pour maîtriser la colère ouvrière. Elles ont déjà joué la comédie de la concertation en participant depuis des mois aux diverses réunions organisées par le gouvernement, même quand elles affirment être catégoriquement opposées au projet, comme c’est le cas de FO ou de la CGT (cette dernière, pour démontrer son caractères responsable, proposant selon son habitude «une autre réforme» et appelle à un «vrai dialogue»), au lieu de préparer la lutte.

En cette rentrée sociale, sur la question des retraites elles ont organisé la division en appelant à des mobilisations séparées selon les corporations, pour défendre les «régimes spéciaux» ou les retraités – alors que l’attaque est globale, ou selon les syndicats. Et elles ne prévoient pas de suite, sauf à la RATP où il a bien fallu tenir compte de la combativité qui s’est exprimée: une grève a donc été annoncée pour dans... trois mois, ce qui laisse toute latitude au gouvernement et à l’entreprise de prendre les mesures pour éteindre l’incendie.

Il faut aussi citer la journée d’action dans la Métallurgie le 6/9, dans la Santé le 11/9, dans les Finances Publiques le 16/9, à EDF le 19/9, dans les Services d’urgence le 26/9 et la journée d’action des retraités le 8/10 et l’on comprend ce que saucissonner les luttes veut dire...

Sur la question de l’assurance chômage (la réforme entrera en vigueur au premier novembre), la CGT, Solidaires et FO n’ont rien trouvé de mieux que de déposer un recours devant le Conseil d’Etat, remplaçant la lutte ouvrière par la guérilla juridique dans les institutions bourgeoises.

Les résultats sont là: la journée de manifestation du 24 septembre appelée par la CGT, la FSU et Solidaires n’a pas rencontré le succès, ce qui a provoqué les commentaires satisfaits des porte-paroles gouvernementaux: les travailleurs seraient convaincus de la justesse de la réforme!

 

Pour l’acte I de la lutte de classe!

 

Evidemment il n’en n’est rien: les travailleurs ont été échaudés par l’expérience répétée des mobilisations syndicales qui ne servent à rien. Le mécontentement est bien présent et la résignation peut laisser la place du jour au lendemain à des explosions de colère, comme le craint le gouvernement.

Mais des explosions de colère sans lendemain ne changeraient pas grand-chose.

Tant que les prolétaires ne seront pas poussés à prendre leurs luttes en main tant qu’ils laisseront la défense de leurs intérêts aux professionnels de la collaboration entre les classes, ils seront battus.

Il n’y a pas de fatalité de la défaite: la rupture de la paix sociale, la reprise de la lutte ouverte et unie par-dessus les divisions corporatistes, voilà la voie qui permettra de résister victorieusement aux attaques bourgeoises et que les prolétaires conscients doivent préparer.

Ce sera alors l’acte I de la reprise de la lutte de classe, qui se terminera par le final révolutionnaire!

 


 

(1) Dans une interview au quotidien patronal Les Echos du 27/2/2018, le bonze en chef de la CFDT, Laurent Berger, gémissait : «Mais attention à la méthode. Il y a dans ce pays des corps intermédiaires attachés à l’intérêt général qui méritent d’être écoutés, considérés ! Au sein de la CFDT, le mécontentement commence à monter (…). Attention au chamboule-tout décidé dans la précipitation et sans réel dialogue. Si on nous piétine, il ne faudra pas ensuite venir nous chercher pour éteindre l’incendie». Mais cela n’a pas empêché notre pompier social de se précipiter pour proposer ses services pour éteindre tous les incendies sociaux qui se sont déclarés ensuite – comme celui des Gilets Jaunes…

(2) cf. Le Monde, 24/9/2019.

(3) cf. Le Journal du Dimanche, 6/10/2019

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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