Correspondance Algérie

(«le prolétaire»; N° 537; Mai-Juin-Juillet 2020 )

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Nous avons reçu il y a déjà quelques temps un texte de jeunes algériens; nous en publions malgré tout de larges extraits, car il a le mérite de critiquer le suivisme des courants d’extrême gauche vis-à-vis orientations majoritaires du mouvement (hirak).

Après son accession au pouvoir à l’issue d’une farce électorale particulièrement grossière, le nouveau président Tebboune, n’a pas réussi à établir un semblant de légitimité autour du nouveau gouvernement. Il n’a pas répondu aux attentes des démocrates qui espéraient plus que quelques gestes d’ouverture pour se rallier au pouvoir. Si plusieurs prisonniers politiques ont été libérés (comme la «trotskyste» Louisa Hannoune qui a sans doute été jugée suffisamment servile), il n’y a pas eu d’amnistie ni de libération générale. Les manifestations du hirak ont continué, jusqu’à ce que l’épidémie du coronavirus touche l’Algérie, obligeant les différents responsables et porte-paroles du mouvement à appeler à leur fin; les autorités en ont profité pour condamner le militant berbère Karim Tabbou, dirigeant de l’UDS (scission du FFS de feu Aït Ahmed) qui devait être libéré après 6 mois de prison, à purger 6 mois supplémentaires. Les démocrates de la CNUAC ont condamné cette condamnation comme une «insulte à l’état de droit» (communiqué du 25/3/20): on se demande dans quel monde vivent ces universitaires, s’ils ne se sont pas encore rendu compte que la justice est au service de l’Etat bourgeois et celui-ci au service du capitalisme? En fait ils le savent parfaitement, mais ils voudraient que l’Etat prenne des gants...Tous ces démocrates (nous n’avons pris la Coordination des Universitaires que comme exemple), même s’ils s’opposent au gouvernement actuel, sont en réalité des défenseurs du capitalisme et des ennemis des prolétaires. C’est contre eux et non avec eux que le prolétariat devra retrouver ses armes et son indépendance de classe.

 

 

(...) Le peuple voilà bien un concept abstrait que nous ont vendu les intellectuels au service de la classe dominante; le peuple n’est pas homogène, il regroupe plusieurs classes sociales qui coexistent dans des rapports socio-économiques antagoniques, l’hégémonie de la bourgeoisie émergente sur les prolétaires avec à sa botte des valets pseudo-intellectuels est si persistante qu’ils ont pu mettre l’écart le combat socio-économique des prolétaires, le rendant même sujet tabou dans le hirak.

(...) Du haut de leur militantisme néophyte, certains énergumènes nantis, crient avec fierté : «Le Hirak est sorti pour des revendications politiques et non sociales ».

Aujourd’hui que le hirak agonise en butant sur ses limites, il est instrumentalisé pour étouffer les luttes sociales, il n’est plus seulement à côté de la plaque, c’est devenu l’outil parfait pour taire les cris assourdissant des prolétaires souffrants. Les luttes sociales explosent, dans un système qui se réorganise, pour s’adapter comme un gant à la composition sociale et asseoir sa domination totalitaire, la classe dominante profite de la diversion du hirak afin de formaliser les derniers codes d’asservissement du prolétariat. Les 8 heures de travail, le congé payé, l’assurance sociale, le week-end, la gratuité de la santé, la gratuité de l’enseignement, la retraite etc., ce sont le fruit de luttes sociales acharnées, souvent payées par le sacrifice de milliers de prolétaires, les revendications politiques en dehors de la révolution prolétarienne, sont vides de contenu.

C’est une opportunité politique pour les carriéristes, les selfistes, les rejetons, les faux intellos et les marcheurs dormant pour se faire une place dans le système, ils composent la météorite qui draine derrière elle, une queue de crédules fonçant tout droit dans le trou noir.

(...)

Au début du capitalisme, les mouvements des prolétaires portaient en eux une radicalité subversive. La nécessité de l’abolition du capitalisme était une évidence à tous les prolétaires. Aujourd’hui le capitalisme qui se matérialise dans un appareil complexe de domination, a appris à gérer les soulèvements des prolétaires, en effet la bourgeoisie politico-financière et industriello-commerçante, a une conscience de classe et connaît la puissance que peut avoir un prolétariat conscient qui se soulève. C’est pourquoi elle lui véhicule l’idée que, c’est le seul monde possible, que rien ne peut arrêter cette machine capitaliste, que les anticapitalistes, sont des Koufars, des utopistes. Ou utilisent l’échec des pays du capitalisme d’État comme l’Urss, ou l’Algérie de Boumedienne pour réfuter les thèses anticapitalistes, ce ne sont que les idées de la classe dominante, on se retrouve alors face à un prolétariat fataliste. (…)Le Capital ne peut maintenir l’assujettissement du prolétariat, qu’en se matérialisant sous le simulacre de concurrence généralisée de tous contre tous, et particulièrement en opposant à chaque fois qu’émerge son ennemi historique - le prolétariat révolutionnaire- différentes oppositions à l’intérieur même du système capitaliste ; lutte entre nations, fascisme et antifascisme, droite et gauche etc., alimente les faux débats qui divisent le prolétariat.

Le Capitalisme laisse donc aux partis de « la gauche du capital » le soin de casser le mouvement des prolétaires émergent, ils le vident de son contenu radicalement subversif et canalisent les antagonismes dans un faux combat, ils sont les instruments de la régulation sociale mais maintiennent - au grand plaisir du système- l’image de révolutionnaire afin d’orienter les masses vers une fausse révolution. «Le capitalisme a cette tendance de transformer le faux en vrai et le vrai en faux » (Marx).                    

Mais ça serait faux d’admettre que ces mouvements de lutte ne changent rien, la lutte formatrice, désillusionne le prolétariat du changement démocratique, les luttes sociales construisent la conscience de classes, la jonction des deux donnera aux prolétaires la conscience révolutionnaire, qui ébranlera la mascarade de l’opposition et restituera à la doctrine de la révolution prolétarienne son aspect le plus subversif, galvaudé par ceux qui flirtent avec la démocratie bourgeoise . L’émancipation des travailleurs ne peut-être l’oeuvre que des travailleurs eux-mêmes » (Marx).

 

À bas la mascarade politique

À bas la propriété privée des moyens économiques

À bas le capitalisme

Vive l’union des prolétaires

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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