A nos lecteurs, à nos sympathisants, à nos camarades

(«le prolétaire»; N° 539; Nov.-Déc. 2020  / Janvier 2021)

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En raison de l’impossibilité pratique de tenir des réunions publiques, de diffuser normalement notre presse et nos positions à cause des confinements et des mesures de restriction de la liberté de mouvement en vigueur dans de nombreux pays, nous avons été pratiquement contraints de réduire la voix du parti au média virtuel de notre site internet ; les personnes intéressées peuvent y trouver nos positions et nos publications dans différentes langues.

Parallèlement, l’expédition postale des journaux a souffert et souffre inévitablement de retards importants dus à la fois aux restrictions de déplacement et à la congestion accumulée à la poste. Les lecteurs et les abonnés de notre presse internationale devront être patients ; le dernier numéro du journal italien arrivera très tard par rapport à sa date de sortie réelle, mais il arrivera. En attendant, les lecteurs peuvent le lire au format pdf ou le télécharger sur notre site.

   

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Le Covid-19 continue à faire de nombreuses victimes; le fait que les hôpitaux soient à nouveau en grandes difficultés notamment dans les unités de soins intensifs et que les virologues les plus sérieux prédisent eux-mêmes que cette pandémie pourrait se poursuivre pendant toute cette année, voire la prochaine, est une nouvelle démonstration que la bourgeoisie ne consacre au soin de la santé humaine que ce qui peut répondre à l’urgence immédiate : sa préoccupation fondamentale est que l’économie reprenne sa marche le plus tôt possible, dans le but de récupérer les profits perdus en 2020 où la crise sanitaire s’est ajoutée à la crise économique déjà en cours.

Les mesures restrictives que les gouvernements avaient imposées depuis mars dernier ont été assouplies pendant l’été lorsqu’il semblait que l’épidémie diminuait considérablement. Mais ce qui n’a pas diminué, c’est la pression du contrôle social exercée par tous les gouvernements sur les lieus de travail comme dans la vie de tous les jours. Une épidémie virale comme celle du coronavirus se propage toujours par l’accumulation d’infections, tandis que la souche virale initiale, se diffusant dans différents pays et différents environnements évolue en produisant des variants avec des caractéristiques différentes ; d’où une tendance de l’épidémie à osciller entre pics et ralentissements que les médias aiment appeler «vagues».

Depuis le début de l’épidémie, la société capitaliste ne s’est pas améliorée du point de vue des soins sanitaires. Par contre l’urgence sanitaire a constitué une opportunité fantastique pour les industriels du secteur, notamment les grandes entreprises pharmaceutiques (« le Big Pharma »). C’est ce à quoi on a assisté dès la fin de l’année 2020: le vaccin anti-Covid, ou plutôt, les différents vaccins que les Pfizer-BioNtech, Astra-Zeneca, Sanofi, Johnson & Johnson et des dizaines d’autres grandes sociétés pharmaceutiques ont commencé où se préparent à produire, sont vantés comme le début du «vrai» remède contre la Covid. Par ailleurs une pandémie de ce type avait déjà été prédite par des simulations réalisées en 2010 et 2019 – dans le sillage de l’épidémie Sars-CoV-1 de 2003 – notamment par des fondations privées de milliardaires comme la Fondation Rockefeller et la Fondation Bill & Melinda Gates, qui ont une forte influence sur l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Mais aucun État n’a pris de mesures pour préparer les établissements de santé publique et le personnel de santé à y faire face.

Les responsables bourgeois à tous les niveaux ont laissé l’épidémie se répandre le monde pendant des mois, alors que la recherche scientifique a redoublé d’efforts pour connaître les caractéristiques fondamentales du nouveau coronavirus afin de mettre en production le fameux vaccin le plus rapidement possible. Plus il y avait d’infections, plus il y avait d’hospitalisations, plus de décès étaient enregistrés mois après mois, et plus se faisait pressant le besoin de disposer d’un vaccin le plus vite possible – peu importe si les essais effectués ne garantissaient pas l’absence de réactions allergiques et des conséquences plus graves, y compris plusieurs années après, comme cela a déjà été le cas pour des vaccins précédents. La production de milliards de doses était en jeu: tous les États allaient concourir pour s’assurer d’une quantité nécessaire à la vaccination d’une importante fraction de leur population. Le gigantesque business du vaccin était lancé, et elle a pris forme ces jours-ci; Les émissions de télévision jouent leur rôle en filmant les camions transportant des doses de vaccin vers tous les pays ou les premières vaccinations.

La course aux vaccins, leur production en milliards de doses, toute l’organisation de la campagne publicitaire pour convaincre la majorité de la population de se faire vacciner, soutenue par la propagation permanente de la peur de cet «ennemi invisible», la menace de licenciement des travailleurs qui refuseraient de se faire vacciner, etc., donnent une idée, même partielle, de l’importance prioritaire que la société capitaliste donne à la santé de son économie par rapport à celle des populations.

Pour les capitalistes, l’urgence sanitaire est une opportunité de gagner de l’argent, de faire des profits en s’affranchissant de la plupart des contrôles et de contraintes administratives, et, surtout, de faire main basse - «légalement» - sur l’argent public, comme l’ont démontré les inévitables scandales sur les blouses, les équipements de protection individuelle, les seringues pour inoculer le vaccin, les autres équipements hospitaliers, etc., qui ont éclaté dans divers pays.

Le compagnon de route du vaccin est la peur de tomber malade et de mourir; cette peur a une cause matérielle bien précise, car la plupart de ceux qui ont besoin de se soigner et qui ne peuvent le faire dans de coûteuses cliniques privées, savent pertinemment que la santé publique est d’abord un fromage pour les bourgeois et les politiciens. La crise sanitaire à laquelle nous avons assisté et à laquelle nous assistons encore, n’a pas été causée par le virus Sars-CoV-2, mais par l’absence totale de toute prévention et de mesures sanitaires adéquates.

Il était naturel que notre presse internationale ainsi que les prises de position publiées sur le site, aient traité de cette crise sanitaire et des conséquences qu’elle a et aura sur le prolétariat

Les prolétaires doivent tirer des leçons importantes de cette crise, non seulement parce que la plupart des malades et des morts du Covid-19 ou avec le Covid-19 sont des prolétaires – comme ils sont les victimes de toute crise sociale – mais parce que tous les États bourgeois ont utilisé la crise sanitaire pour imposer un contrôle social renforcé qui ne consiste pas seulement en une répression pure et simple par la police ; aujourd’hui le contrôle social par l’État – c’est-à-dire par la classe dirigeante bourgeois –, se réalise à l’aide des moyens de propagande technologiquement les plus avancés.

Autrefois la propagande, en plus des outils classiques de l’école et des organisations religieuses, était confiée avant tout à la presse, à la radio, au cinéma ainsi qu’aux rassemblements publics; puis vint la télévision, et la propagande bourgeoise entra directement dans les habitations non seulement par la voix, mais avec des films comme au cinéma, mais sans sortir de chez soi

Puis apparurent Internet et les réseaux sociaux qui ont donné la possibilité de ne plus être un simple auditeur ou lecteur passif, mais un internaute intervenant activement dans un espace virtuel où des millions d’autres peuvent accéder en temps réel; avec le passage de l’ordinateur au smartphone, la propagande bourgeoise accroit son influence potentielle non seulement sur la masse, mais aussi sur chaque composante de cette masse qui peut être touchée à toute heure du jour et de la nuit partout où les connexions fonctionnent. L’organisation commerciale de la production capitaliste élargit ainsi considérablement son champ d’action et accélère en même temps les possibilités de vente en s’orientant vers des acheteurs potentiels dont elle connaît déjà les caractéristiques. En outre la tendance à la concentration et à la centralisation économiques s’accélère, ruinant nombre de petits producteurs et de petits commerçants comme le veut le développement capitaliste.

  Ces moyens, comme on le sait, sont aussi des outils de travail ; grâce à leurs caractéristiques informatiques, ils sont utilisés à la fois comme moyens de communication entre entreprises, entre fournisseurs et clients, entre partenaires commerciaux, entre patrons et employés, et comme moyen d’enquêter sur la vie privée de chacun, ses contacts, ses préférences, ses achats.

 Dans la société qui a fait de la vie privée la sphère idéalement intouchable de l’individu, c’est précisément la vie privée qui est détruite, ridiculisant ainsi la prétention bourgeoise de protéger une confidentialité qui n’existe pas, même si la soi-disant «haute société», la grande bourgeoisie, ceux qui tirent les ficelles des intérêts capitalistes et impérialistes, en dépit de leurs proclamations d’agir dans l’intérêt du «bien commun», de la «communauté nationale» ou même «internationale», agissent en fait secrètement dans des réunions réservées où sont passés des accords non rendus publics.

L’histoire de la lutte entre les classes a montré que les adversaires apprennent les uns des autres, en utilisant les moyens utilisés par l’un ou l’autre camp, en copiant et en essayant d’affiner les méthodes de leur utilisation. Dans les entreprises comme dans l’armée l’espionnage est la règle. Il en va de même dans le cyberespace, et les « hackers » (pirates informatiques) sont là pour prouver que dans une société où la concurrence commerciale est toujours plus impitoyable, il n’existe de confidentialité absolue.

Comme hier le policier et le serrurier ont appris du voleur et du cambrioleur l’art d’entrer dans les lieux privés et d’en ressortir avec le butin, et le voleur et le cambrioleur ont appris du policier et du serrurier leurs nouvelles techniques d’enquête et de fabrication de serrures, aujourd’hui, les experts en informatique apprennent des hackers. La grande différence est qu’hier le voleur et le cambrioleur devaient se rendre en personne à l’endroit choisi pour leur méfait, alors qu’aujourd’hui le hacker peut depuis sa chambre entrer électroniquement dans n’importe quel système informatisé, sur n’importe quel ordinateur, même s’il se trouve à l’autre bout du monde.

 

Tout cela freinera-t-il ou facilitera-t-il la reprise de la lutte de classe par le prolétariat?

Le prolétariat pourra-t-il s’organiser plus facilement grâce à ces nouveaux moyens de communication sur le terrain de la lutte de classe?

Aura-t-il plus ou moins de chances d’établir des relations de classe solides d’une ville à l’autre, d’un pays à l’autre, d’une génération à l’autre?

 

Comme toujours, le problème n’est pas l’instrument, mais son utilisation. Tant qu’il est entre les mains de la classe dirigeante et qui l’utilise pour plier les prolétaires à ses exigences de domination, c’est un instrument de la contre-révolution. Quand la lutte de classe prolétarienne reprendra son cours, c’est-à-dire lorsqu’une partie non infinitésimale des prolétaires luttera sur le terrain de classe, en utilisant des méthodes de lutte classistes (orientées exclusivement vers la défense des intérêts prolétariens) et en s’organisant en complète indépendante de tout autre classe sociale et de toute organisation bourgeoise ou contrôlée par la bourgeoisie, alors le prolétariat pourra, ou devra, sélectionner pour ses objectifs révolutionnaires de classe certains instruments de lutte utilisés par l’ennemi. Tout dépendra du rapport des forces de entre prolétariat et bourgeoisie, et de la maturation des facteurs favorables à la lutte de classe révolutionnaire. Par exemple l’utilisation de méthodes et de moyens de lutte des groupes terroristes comme les Brigades rouges, ou, au contraire, l’utilisation de la méthode parlementaire et de la conciliation interclassiste sont non seulement inutiles mais contre-productives pour la reprise même de la lutte de classe.

Le parti de classe, qui doit donner y compris dans son oeuvre quotidienne un exemple de continuité révolutionnaire, non seulement sur le plan théorique, mais aussi sur le plan pratique et comportemental, ne doit jamais céder aux mirages avec lesquels la classe dominante tente d’attirer dans son camp – et donc pour la défense de son système social – en profitant de la difficulté réelle du prolétariat à se reconnaître comme classe distincte et irrémédiablement antagoniste la bourgeoisie ; il devra nécessairement faire usage des outils de communication et de propagande, en choisissant parmi tous ceux qui existent ceux qui correspondent le mieux au besoin d’atteindre, compte tenu des différentes situations, le plus grand nombre de prolétaires et de défendre le plus solidement sa continuité théorique, idéologique et organisationnelle

C’est la raison pour laquelle nous avons ouvert un site internet absolument indépendant de tout autre groupe politique ou économique, et non un forum de discussion où priment les opinions personnelles, ou un « profil » sur les réseaux sociaux (Facebook, YouTube, twitter, WhatsApp, Instagram ou autre) comme le font d’autres groupes désireux d’augmenter le nombre de leurs militants ou sympathisants en utilisant le levier de la flatterie personnelle et en proposant des positions de parti à la manière de produits commerciaux.

De même que nous n'avons jamais accepté la publicité commerciale dans notre presse depuis la création du parti après la Seconde Guerre mondiale (non pas par une pureté idéologique mal comprise, mais pour ne pas être économiquement dépendant des entreprises qui font la publicité de leurs produits), nous ne dévierons donc pas de ce qui a toujours été, non par choix, mais par des conditions matérielles et historiques objectives, le chemin ardu du militantisme révolutionnaire et ses attitudes cohérentes ; nous refuserons les voies apparemment d’aller plus faciles, moins fatigantes, plus «à la portée des masses », mais qui sont en réalité opportunistes. L'histoire de l'opportunisme, des déviations par rapport au cours révolutionnaire qui commencent par de petites et légères déviations sur les plans organisationnels ou tactiques avant de se transformer en dérapages dangereux et finalement en positions contre-révolutionnaires, est malheureusement pleine de tels épisodes. 
Les marxistes doivent tirer les enseignements vitaux de cette histoire comme notre parti l'a fait hier sous la direction d'Amadeo Bordiga.

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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