Venezuela

Une seule issue pour les prolétaires: la lutte des classes

(«le prolétaire»; N° 548; Mars-Avril-Mai 2023)

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Depuis janvier de cette année, les grèves et les manifestations de rue se sont multipliées au Venezuela, principalement organisées par les travailleurs de l’éducation. Les slogans des manifestations tournent autour des salaires : «le dollar monte, les salaires baissent, la faim avance» ; «Et toi, Maduro, président des travailleurs, combien gagnes-tu ?»; «Salaires de misère, pensions de mort».

Et ce n’est pas étonnant : selon l’agence Bloomberg, le salaire minimum réel au Venezuela était de 8 dollars en décembre et en janvier ne dépassait pas 6 dollars (!), de loin le salaire le plus bas d’Amérique latine. À cela s’ajoute l’hyperinflation qui, selon les chiffres du gouvernement, atteint 234 %, incomparable certes à celle de 2018, qui a atteignait 130.000 %, mais qui reste toutefois après le Soudan, la plus élevée du monde. D’autre part, la Banque mondiale estime que les personnes qui survivent avec moins de 2,15 dollars par jour sont en situation d’extrême pauvreté... Il n’y a pas de mots pour qualifier cela.

D’autre part, le gouvernement promeut l’idée que «le Venezuela va mieux», mais pour l’économiste M. Sutherland «si le Venezuela croît au même rythme que celui annoncé par Maduro en 2021, c’est-à-dire 5%, il faudra 32 ans pour retrouver l’économie de 2013». Il est plus que probable que cette reprise ne profitera pas aux classes pauvres de la société vénézuélienne. Selon Encovi-Venezuela (Encuesta Nacional sobre Condiciones de Vida), une organisation citée par le New York Times, «...pour la première fois en sept ans, la pauvreté diminue : la moitié du pays vit dans la pauvreté, contre 65 % en 2021». Comme l’illustre le journal nord-américain, «beaucoup survivent avec l’équivalent de quelques dollars par jour, et les employés du secteur public sont descendus dans la rue pour protester contre les bas salaires»... Mais l’enquête, toujours selon le NYT, a également révélé que «les Vénézuéliens les plus riches sont 70 fois plus riches que les plus pauvres, ce qui place le pays au même niveau que certains pays d’Afrique qui affichent les taux d’inégalité les plus élevés au monde».

Cette terrible inégalité est l’une des conditions exigées par les institutions bourgeoises, surtout américaines, pour que le gouvernement Maduro reste au pouvoir, avec une paix sociale faible, mais sans comparaison avec celle d’il y a 3 ans. C’est la raison fondamentale de la désintégration de l’opposition bourgeoise, qui a abandonné en décembre sa marionnette de «président autoproclamé», M. Guaidó, devenu plus impopulaire que Maduro, notamment en raison de la gestion frauduleuse des ressources fournies par l’Union européenne et les États-Unis. Il ne pouvait en être autrement !

Les manifestations ont surpris le gouvernement, et les manifestants eux-mêmes, qui avant l’appel à manifester, ne s’attendaient pas à voir autant de travailleurs dans les rues. Mais le mécontentement s’étend: à Ciudad Guayana, principal centre d’industrie lourde du pays, qui souffre aujourd’hui de baisses de production faute de moyens pour assurer la maintenance et la modernisation, les travailleurs de Sidor, principale entreprise aux mains de l’Etat chaviste, aidés par des travailleurs d’autres secteurs de la région, sont descendus dans la rue pour réclamer de meilleurs salaires et le respect des acquis contractuels. Une douzaine de militants ouvriers ont été emprisonnés et accusés de sédition (tout le sud-est du Venezuela est une zone de sécurité), mais grâce à la pression des travailleurs, ils ont été rapidement libérés. Le secteur de la santé, dont la résistance pendant plusieurs années a sauvé l’honneur des prolétaires de ce pays, s’est également mobilisé, ainsi que les travailleurs du pétrole, les fonctionnaires et les retraités pour les mêmes raisons : la faim et la misère.

Le 12 janvier, tous ces manifestants s’attendaient à entendre de la bouche du président Maduro, dans son message annuel, un avis positif sur leurs revendications. Mais il s’est contenté de dire qu’il ne pouvait pas encore augmenter le salaire minimum à cause du «blocus», c’est-à-dire des 900 sanctions économiques imposées par les États-Unis au pays caribéen; mais il faut dire que ces sanctions et la pression exercée sur Caracas ont suffisamment diminuées, pour que l’on puisse commercer davantage de pétrole, principale source de devises du Venezuela. Il ne fait aucun doute que ces sanctions ont durement touché la capacité et le potentiel économiques du Venezuela et qu’elles poussent le gouvernement à prendre des mesures aux détriment de la grande majorité de la population. « Nous sommes conscients et nous agissons», a déclaré M. Maduro.

Le 23 janvier, date anniversaire de la célébration de la démocratie au Venezuela, les secteurs des travailleurs susmentionnés sont à nouveau descendus dans la rue par milliers dans tout le pays. Il n’y a pas eu de blessés, de morts ou d’arrestations, mais les forces de sécurité se sont mobilisées à grande échelle pour tenter d’empêcher les manifestants de passer, et les secteurs chavistes ont proféré des menaces et organisé des contre-manifestations appelant à la défense de la patrie contre le joug impérialiste: les manifestations chavistes se sont autoproclamées «rébellion anti-impérialiste», ce qui est un vulgaire chantage, comme si, au nom de la patrie, il fallait souffrir de la faim et de la misère...

Dans cette situation complexe et difficile, où la bourgeoisie vénézuélienne s’enrichit avec la permission d’un parti qui se dit socialiste et où les prolétaires s’appauvrissent de façon phénoménale, les manifestations, les arrêts de travail et les grèves sont un bon signe qu’il faut saluer car ils sont la voie du salut pour les prolétaires : la lutte des classes.

 

24/03/2023

 

 

Parti Communiste International

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