Oraison funèbre des sans-voix pour un député bourgeois

(«le prolétaire»; N° 558; juillet-Octobre 2025 )

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Ils sont venus pleurer Olivier Marleix.

Ils ont salué un homme «sincère», un «républicain intègre», un «serviteur de l’Etat».

Nous, prolétaires, ne partageons ni leur deuil ni leur mémoire. Ce qu’ils pleurent, ce n’est pas un homme...mais une fonction, un rouage. Ils pleurent l’un des chiens de garde de l’ordre, un de ceux qui ont prêté serment à la machine capitaliste.

Ils pleurent un député, c’est-à-dire un gestionnaire, un illusionniste, un transmetteur de domination.

*

Ils nous disent : il a défendu la souveraineté industrielle.

Mais quelle est cette souveraineté ?

Celle des actionnaires, des conseils d’administration, de la bourgeoisie impérialiste.

Quand les ouvriers tombent, quand les usines ferment, quand les quartiers brûlent - où sont ces députés ?

*

Ils nous disent: il avait des convictions.

Mais nous n’en voyons qu’une, solide: sa croyance en la république bourgeoise, c’est-à-dire en l’État du capital.

Pas une république sociale, pas une république prolétarienne, mais la république du capital... et des casques de police.

*

Ils nous disent : il s’est opposé à Macron.

Mais dans le théâtre bourgeois, il faut toujours des acteurs pour que le spectacle continue.

Ce ne sont pas des adversaires, mais des complices de scène.

*

Ils nous disent: c’était un homme droit.

Mais droit devant quoi ?

Droit dans un hémicycle où les damnés de la terre ne s’assoient jamais.

Droit dans un appareil qui écrase, humilie, exploite– jour après jour, loi après loi.

De droite, certes...

mais pas en opposition à l’aile gauche de la bourgeoisie.

Il était simplement de l’autre côté de la même bande: celle qui promet des réformes pour sauver ce qui doit être détruit, celle qui propose une «nouvelle» république pour ressusciter l’ancienne.

Il était droit, bien droit... au garde-à-vous devant le seul vrai maître : le Capital.

*

Dans cet hémicycle, on ne s’assied pas pour renverser l’ordre – mais pour l’administrer ou l’embellir.

Certains préservent, d’autres accompagnent – tous obéissent.

*

Ils nous disent: il a disparu.

Mais ce n’est pas une disparition, c’est un remplacement, une transmission de fonction, une continuité. Un engrenage usé trop vite est remplacé par un autre. Le mécanisme de l’État ne s’arrête pas.

*

Ils voudraient nous faire chanter :

«Ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre à ta place».

Ils rêvent qu’un jour, comme cela s’est produit dans un passé pas si lointain, les prolétaires chanteront avec eux, à l’unisson:

«Député, si tu tombes, un autre député sort de l’ombre à ta place».

Mais ce chant n’est pas le nôtre.

C’est l’hymne d’une résistance interclassiste, où patriotes bourgeois, syndicalistes réformistes et staliniens se sont unis non pas pour détruire le capitalisme, mais pour le restaurer après la défaite de sa variante fasciste.

*

Aujourd’hui comme hier, ce sont les amis de l’ordre qui sortent de l’ombre pour remplacer les morts. Un autre viendra. Il prendra le siège et l’ordre de marche, peu importe l’habit qu’il portera, tant qu’il reste fidèle au mutisme que la classe dominante exige de ses serviteurs.

*

Et nous, sans nom, sans gloire, sans cercueil sur Paris Match, nous continuerons à creuser, à lutter, à tomber.

*

Mais un jour, nous ne pleurerons plus les députés...

Nous fêterons la fin de leur monde, dans un cri de joie planétaire: Bien creusé, vieille taupe !

Car pendant qu’ils prennent leur tour à la surface, la vieille taupe continue de creuser.

Elle creuse sous leurs palais, sous leurs hémicycles, sous leurs certitudes.

Et quand elle refera surface...

ce ne sera pas pour remplacer un député, mais pour abolir leur règne.

 

 

Parti Communiste International

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