Non à l'intervention militaire impérialiste en Libye !
(«le prolétaire»; N° 499; Mars - Avril 2011)
Depuis samedi 19 mars une coalition militaire sous commandement américain, comprenant, outre des Forces anglaises et françaises, une participation canadienne, italienne, espagnole et d’autres pays, a commencé le bombardement d’installations militaires et de concentrations de troupes fidèles au gouvernement de Kadhafi. Le but affirmé de cette intervention militaire qui a reçu l’aval du Conseil de Sécurité de l’ONU et de la Ligue Arabe, serait d’obtenir l’arrêt de l’offensive des forces gouvernementales contre les rebelles, afin d’éviter un «massacre des populations civiles».
Cependant lorsque de véritables massacres de civils ont eu lieu, au début de la révolte, les autorités de tous ces pays, à commencer par les gouvernements européens, ont répondu par un silence total. Quand les informations sur les tueries ont commencé à filtrer à l’extérieur de la Libye, ils se sont contentés de leurs hypocrites admonestations rituelles, priant le gouvernement Libyen de faire preuve de « retenue » et d’éviter un usage « disproportionné » de la force. C’est le premier ministre italien Berlusconi qui a trahi la raison de cette attitude lorsqu’il a déclaré qu’il n’avait pas appelé Kadhafi pour lui demander de cesser la répression « parce qu’il ne voulait pas le déranger » : les gouvernements européens ne voulaient pas « déranger » le gouvernement Libyen quand il luttait pour rétablir son ordre dans le sang !
La poussée de la révolte ne cessant pas en dépit de cette répression, au point de paraître menacer le régime, les grands pays impérialistes occidentaux ont alors commencé à faire pression sur Kadhafi et ses alliés : gels d’avoirs financiers, embargo sur les armes, etc. En même temps, selon des informations parues sur certains organes de presse (cf par exemple le « Wall Street Journal » du 9/3/11), des discrets pourparlers étaient engagés , en particulier par les Américains , avec certaines fractions du pouvoir Libyen ; il ne s’agissait donc pas d’aider les révoltés à faire tomber le régime, mais de mettre en place une solution à la Tunisienne ou à l’Egyptienne : la mise à l’écart de Kadhafi pour sauver le régime lui-même. En effet ce régime était engagé depuis plusieurs années dans une collaboration étroite avec l’impérialisme américain (lutte contre l’islamisme) et les impérialismes européens (rôle de garde-frontière et de blocage de travailleurs immigrés africains). En outre c’est un fournisseur non négligeable de pétrole, sans parler d’un marché juteux, grâce aux revenus tirés de ce pétrole, pour les entreprises capitalistes de nombreux pays.
L’évolution de la situation interne, marquée par la contre-attaque des gouvernementaux en particulier grâce aux mercenaires tchadiens et nigérians et par l’obstination du clan Kadhafi à ne rien céder, à rendu impossible cette solution. Sous l’impulsion des gouvernements français et anglais, les Etats-Unis et les autres puissances impérialistes du Conseil de sécurité de l’ONU, cette moderne caverne des brigands, et la Ligue Arabe ( de l’Egypte à l’Arabie Saoudite et aux Emirats) , cet ensemble d’Etats plus autoritaires et répressifs les uns que les autres, ont finalement donné le feu vert à l’intervention militaire occidentale en faveur de la «démocratie». En même temps tous ces défenseurs de la démocratie entérinaient l’intervention militaire saoudienne pour écraser la rébellion à Bahrein et le massacre de dizaines de manifestants par le gouvernement du Yémen !
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Le mouvement de rébellion en Libye, né sur la vague des révoltes qui ont secoué les pays voisins depuis le début de cette année, a mobilisé sans aucun doute les masses prolétarisées du pays contre la misère , l’oppression et la répression ; mais il a aussi, comme c’était inévitable, exprimé les aspirations bourgeoises et petite-bourgeoises de factions, de couches ou de « tribus » marginalisées par les proches de Kadhafi, à s’emparer d’une part plus grande du gâteau et du pouvoir : ce sont les représentants de ces couches bourgeoise qui se sont installé comme dirigeants des insurgés et qui ont été reconnus par Sarkozy comme « représentants légitimes du peuple Libyen » . Ce n’est pas par hasard si le principal représentant du dit « Conseil National »de Benghazi est Al Jeleil, ancien ministre de la Justice de Kadhafi, responsable à ce titre d’innombrables arrestations et maintien en détention arbitraires. Ce n’est pas par hasard non plus si les autorités insurgées ont laissé se dérouler à Benghazi les pogroms contre les travailleurs immigrés africains…
Les prolétaires n’ont rien à de bon à attendre du tueur Kadhafi, ni de la coalition impérialiste ; mais rien non plus du gouvernement provisoire qui s’est formé sous les couleurs de l’ancien royaume de Libye. En réalité les prolétaires de Libye, qu’ils soient indigènes et surtout immigrés (les travailleurs immigrés, égyptiens, tunisiens, d’Afrique Noire ou du Continent Indien, représenteraient la moitié des prolétaires du pays selon certaines estimations), ont subi, subissent et vont subir les conséquences les plus graves non seulement de la répression des milices kadhafistes, mais aussi des affrontements entre les diverses factions et maintenant de l’intervention militaire impérialiste.
La guerre déclenchée contre Kadhafi, même si elle se « limite » pour l’instant à des bombardements aériens, est une guerre de piraterie impérialiste, comme celles qui l’ont précédée en Afrique, au Moyen-Orient et ailleurs. La vague de révoltes qui a fait vaciller des régimes qui passaient être de solides alliés des impérialistes occidentaux, a en même temps aiguisé les contradictions et les oppositions entre les grandes puissances capitalistes, à un moment où la crise économique pousse chacune d’entre elles à défendre avec plus d’âpreté ses intérêts propres contre ceux de ses concurrents. La crise du régime Libyen a poussé tous les grands et moins grands Etats à se précipiter pour pousser leurs pions, faisant voler en éclats une unité seulement de façade de la « communauté internationale » . L’ « affaire Libyenne » a redonné l’occasion à la Grande- Bretagne et à la France d’essayer de dicter la loi en Méditerranée – tout en s’implantant davantage dans un pays riche en pétrole ; les Etats-Unis, tout en maintenant en apparence un profil bas, ont démontré une nouvelle fois à leurs alliés qu’ils étaient encore les maîtres réels ; derrière eux l’Italie et l’Espagne sont présentes pour pouvoir réclamer leur part de butin, tandis que l’Egypte ne veut pas être tenue à l’écart de ce qui se passe chez un de ses voisins et que les Emirats veulent occuper un strapontin pour avoir les mains libres dans la répression chez eux. D’un autre côté l’Allemagne, la Russie ou la Chine ne voient pas d’un bon œil cette action américano- anglo-française…
Vive la lutte prolétarienne internationale contre le capitalisme !
Les prolétaires ont des intérêts diamétralement opposés à ceux des factions et des Etats bourgeois qui sont en lice dans cette mêlée sanglante. En guerre comme en paix, ils sont exploités, opprimés et réprimés, ils connaissent la misère, la pauvreté et la mort au travail. Quel que soit le gouvernement, ils ne peuvent compter pour se défendre que sur leurs propres forces, que sur leur propre lutte, que sur leur propre organisation. Et cette lutte et cette organisation ne peuvent devenir possible qu’en rompant tout lien avec les orientations et les organisations bourgeoises, qu’elles soient religieuses ou laïques , démocratiques ou nationalistes.
Le parti de classe incarne la lutte du prolétariat de tous les pays contre le capitalisme et le pouvoir bourgeois ; il est l’organe indispensable du prolétariat pour centraliser ses luttes et les diriger vers la victoire révolutionnaire. Ce parti n’existe pas aujourd’hui, si ce n’est sur le plan de la théorie et du programme, de même que n’existe pas la lutte générale de classe dans tous les pays.
Mais les révoltes comme celles qui éclatent aujourd’hui dans les Pays Arabes et celles qui éclateront demain, démontrent que les contradictions économiques et sociales incurables du capitalisme sont à l’œuvre et qu’elles pousseront les travailleurs, y compris des grands pays impérialistes, à reprendre la voie de la véritable lutte révolutionnaire contre le capitalisme. Des dizaines de milliers de travailleurs immigrés fuyant la Libye ont été accueillis fraternellement par leurs frères tunisiens : c’est là un petit signe de la solidarité prolétarienne internationaliste. C’est sur cette voie que reprendra la lutte de classe et que renaîtra le parti communiste révolutionnaire, en s’appuyant sur les enseignements marxistes et les leçons des grandes luttes et des révolutions ouvrières du passé.
Les avions, porte-avions, sous-marins et navires de l’armada occidentale mobilisée dans les eaux et les cieux de Libye ne suffiront pas à stopper la vague de révolte qui commence maintenant à s’étendre jusqu’en Syrie et au Maroc ; celle-ci pourra peut-être marquer un temps d‘arrêt, mais elle renaîtra inévitablement pour battre contre toutes les digues édifiée par les classes dominantes. Jusqu’à ce que le prolétariat, en ayant assez de verser sa sueur et son sang pour engraisser les capitalistes, se lance dans la seule guerre qui vaille : la guerre de classe contre toutes les bourgeoisies, à commencer par celle de son propre pays !
20/3/2011
Parti communiste international
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