Non à une intervention militaire impérialiste française au mali!

(«le prolétaire»; N° 505; Novembre-Décembre 2012)

Retour sommaires

 

 

Les informations les plus contradictoires se succèdent à propos d’une intervention militaire au nord-Mali (appelé aussi Azawad par les mouvements indépendantistes) qui est tombé il y a plusieurs mois entre les mains des indépendantistes Touaregs, puis des Islamistes. L’envoyé spécial de l’ONU pour le Sahel, qui n’est autre que l’ancien premier ministre italien Romano Prodi a déclaré fin novembre qu’une action militaire ne serait pas possible avant... septembre 2013 et il a dit souhaiter une «solution politique». Mais de son côté le président de la commission de la CEDEAO (communauté des pays de la région) a affirmé lors d’une réunion à Paris que l’intervention militaire de plus de 3000 soldats pouvait avoir lieu immédiatement.

Il y a clairement une divergence entre les divers acteurs à l’oeuvre dans la région. Depuis des mois l’impérialisme français travaille à une intervention militaire – tout en refusant une action directe de ses troupes au sol; il a réussi à mettre sur pied la force militaire de la CEDEAO et il a obtenu de l’Union Européenne des crédits pour former les soldats maliens (l’Allemagne, l’Espagne, la Belgique, la Grande-Bretagne la Suède et la Finlande participeraient à cette entreprise). Mais l’Algérie riveraine est hostile à une intervention militaire étrangère et elle préconise des négociations avec les Islamistes. Des affrontements armés ont lieu entre les indépendantistes Touaregs du MLNA et les Islamistes du Mujao, d’Ansar Dine et de l’AQMI; mais Ansar Dine, qui prend part à des négociations au Burkina Faso ou en Algérie a pris publiquement ses distances avec les autres organisations islamistes et il a promis de lutter contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière; il faut dire que le chef d’Ansar Dine, un rebelle touareg de longue date, avait mené dans le passé des négociations avec le gouvernement malien et même entretenu des liens avec l’ambassade américaine (selon la revue américaine liée aux services «anti-terroristes» CTC Sentinel n°5/7, juillet 2012). Entre-temps des dizaines de milliers d’habitants ont fui la région pour se réfugier dans le sud, aggravant la crise économique qui sévit dans le pays; la petite industrie malienne, centrée sur la transformation des produits agricoles, le textile, est en plein marasme et licencie à tour de bras, de même que le secteur du commerce. Seules semblent surnager les entreprises du secteur minier qui appartiennent à des multinationales comme les mines d’uranium de la société française Areva...

Nous publions ci-dessous le texte de notre tract diffusé en octobre.

 

*      *      *

 

Cela fait plusieurs semaines que des bruits de botte de plus en plus insistants se font entendre à propos du Mali. Fin septembre le président français Hollande est allé avec le ministre des Affaires Etrangères Fabius à l’Assemblée générale de l’ONU plaider pour un feu vert à une intervention militaire dans le nord du Mali, ce qu’il a obtenu sans difficultés des grandes puissances impérialistes !

Mais en réalité depuis plusieurs mois, depuis le renversement du président Amadou Toumani Touré, la diplomatie française travaille pour préparer cette intervention militaire, que ce soit par des négociations avec l’Algérie voisine ou par l’envoi de forces spéciales au Burkina Faso (1).

Après que les guérilleros touaregs aient infligé une lourde défaite aux militaires maliens, les contraignant à se replier sur le sud du pays (le «pays utile» où se trouve l’écrasante majorité de la population, par rapport au nord semi-désertique) ceux-ci le 22 mars prenaient le pouvoir à Bamako. Sous la pression des Etats voisins et de l’impérialisme français, les militaires ont été contraints début avril de laisser la place à un «président par intérim», Traoré. Mais à peine a-t-il pris ses fonctions, que le nouveau président a été blessé lors d’une attaque du palais présidentiel par des manifestants nationalistes partisans des militaires ; et il est parti en France se soigner.

 Le premier ministre, Cheick Modibo Diarra, revenu exprès des Etats-Unis où il travaillait à la NASA, a dirigé le pays pendant cette vacance présidentielle. Lorsque Traoré est revenu en août de Paris, un «gouvernement d’union nationale» a été alors formé, conformément à l’«ultimatum» lancé par les pays africains de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest); mais les divergences entre le clan présidentiel et le premier ministre, notamment sur l’attitude à adopter vis-à-vis du nord, n’ont pas disparu pour autant.

Dans les semaines qui ont suivi les pressions internationales se sont accentuées pour une intervention militaire étrangère au Nord, où les guérilleros touaregs ont été contraints de laisser la place à des organisations islamistes.

Ces dernières étaient probablement mieux armées, mais elles auraient profité surtout, semble-t-il, de la colère des populations de Tombouctou et d’autres villes devant les «abus» des Touaregs; le rétablissement de l’ordre, fut-ce l’ordre islamique d’une Chari’a brutale, aurait apparemment été apprécié positivement, au moins au début, par certaines couches de la population (2).

Pour préparer les esprits à une intervention militaire, une campagne d’opinion internationale s’est développée sur les «atrocités» commises dans le nord (destructions de monuments religieux, lapidation d’un couple adultère, etc.); le premier ministre appelait en première page du quotidien Le Monde à «déloger les narcotrafiquants et les terroristes du Mali», critiquant la volonté du président de négocier et félicitant Fabius et Hollande pour leurs interventions à l’ONU (3). Finalement le gouvernement malien avait cédé et officiellement demandé début septembre une intervention militaire étrangère pour livrer bataille au nord.

Grand comme deux fois la France, mais peuplé seulement de 15 millions d’habitants, le Mali est un pays pauvre qui dispose cependant de ressources potentielles encore peu exploitées (à part la production d’or); l’impérialisme français a de multiples intérêts à intervenir dans son ancienne colonie: ressources minières avec la présence probable de pétrole et de gaz et des gisements d’uranium dans la partie nord, mais aussi protection de son «influence» dans toute la sous-région.

L’impérialisme américain qui, depuis quelques années, accroît sa présence militaire en Afrique parce qu’il est attiré, comme d’autres (en premier lieu la Chine), par les ressources en matières premières du continent, soutient une intervention militaire pour «maintenir l’ordre» – l’ordre des pilleurs impérialistes ! – dans la région.

L’impérialisme français voudrait cependant ne pas apparaître en première ligne ; il préférerait laisser combattre des supplétifs africains et se contentant d’assurer la logistique et l’appui aérien. La présence à Bamako de militaires de l’ancienne puissance coloniale susciterait à coup sûr des manifestations hostiles: chacun sait bien que les actions de l’impérialisme français n’ont jamais été motivées par le sort de la population locale!

Ni les populations du nord-Mali, Touaregs ou non, ni en général les masses pauvres maliennes, ni les prolétaires, n’ont rien à gagner d’une intervention militaire impérialiste, dont d’une façon ou d’une autre ils feront les frais.

 Les maux dont souffrent les masses maliennes ne seront pas résolues par la guerre, mais par la lutte sociale et politique contre les racines de l’oppression : la seule voie pour résoudre les problèmes qui se posent aux prolétaires des pays capitalistes comme aux masses maliennes, réside dans la lutte contre l’ordre impérialiste international : c’est lui qui condamne d’un côté des populations entières à végéter dans une misère sans espoir, et de l’autre les prolétaires du monde entier à subir une exploitation toujours plus grande.

 Et dans cette lutte ce sont les prolétaires des pays impérialistes qui ont la responsabilité la plus grande, parce que ce sont eux qui peuvent frapper au coeur le capitalisme mondial et détruire son ordre inhumain.

 

Non à toute intervention militaire impérialiste française au Mali!

Impérialisme hors d’Afrique!

Vive la révolution communiste mondiale !

 

08/10/2012

 


 

(1)   Voir Le Figaro, 23/9/12. Cet article apparemment très bien informé par des sources militaires françaises parle aussi d’un «rôle trouble» des autorités algériennes, parce qu’elles chercheraient à négocier. www.lefigaro.fr/international/2012/09/23/01003-20120923ARTFIG00152-mali-la-france-en-pointe-contre-aqmi.ph Les troupes spéciales françaises sont basées au Burkina Faso www.marianne2.fr/blogsecretdefense/Mali-le-COS-est-bien-present-au-Sahel-contrairement-a-ce-que-dit-Laurent-Fabius_a763.html

(2) www.jolpress.com/international-mali-intervention-armee-militaire-assemblee-generale-onu-islamistes-nord-aqmi-ansar-dine-mujao-touaregs-mnla-charia-article-813612.html

(3) Le Monde, 1/10/2012. Le premier ministre est menaçant: «il faut dès maintenant sécuriser les grandes villes du Mali». Qui vise-t-il vraiment, sinon les opposants à sa politique capitaliste parmi les masses ?

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

Retour sommaires

Top