PROLÉTAIRES DE TOUS LES PAYS, UNISSEZ-VOUS !

Dans la lutte contre la bourgeoisie de tous les pays, dans la lutte contre la guerre bourgeoise, dans la lutte pour la révolution prolétarienne et pour l'émancipation générale de l'exploitation capitaliste !

(«le prolétaire»; N° 544; Mars - Juin 2022)

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Après plus de deux ans de pandémie de Covid et d’un contrôle social toujours plus étroit dans tous les pays par la classe dirigeante, période au cours de laquelle elle a amplement démontré qu’elle ne peut empêcher les crises sociales qu’elle provoque mais qu’elle en profiter pour plier encore plus la classe prolétarienne à ses revendications de domination politique et sociale, la guerre a éclaté entre la Russie et l’Ukraine.

Après 8 ans de guerre de «basse intensité» - comme aiment à l’appeler les plumitifs en tous genres - au cours de laquelle les forces militaires ukrainiennes n’ont cessé de réprimer la population russophone du Donbass dans le but d’écraser le nationalisme russophile sous leur propre nationalisme en prenant le contrôle total d’une région parmi les plus riches en ressources naturelles du pays, les prolétariats russe et ukrainien ont été mobilisés dans une guerre fratricide. Dans une guerre où les prolétaires qui sont en réalité des frères de classe, au-delà de leur nationalité et du pays auquel ils appartiennent, s’entre-tuent pour ne faire prévaloir que les intérêts de leur propre bourgeoisie sur ceux de l’ennemi. Ce sont de la chair à canon parce que dans les guerres bourgeoises les masses prolétariennes, armées pour défendre le capitalisme national, constituent la majorité des troupes militaires ; et ils le sont parce que dans les guerres modernes, les villes, les villages, les usines sont systématiquement bombardées pour affaiblir les troupes sur les fronts de guerre et pour empêcher toute forme de résistance qui pourrait surgir des populations civiles.

Les lois de la guerre bourgeoise ne sont que les lois de la concurrence économique capitaliste poussées à leurs conséquences extrêmes. Des lois qui répondent aux mêmes besoins de survie du capitalisme et de domination politique bourgeoise sur la société ; le général prussien Von Clausewitz, au début du XIXe siècle, affirmait déjà que la guerre est la continuation de la politique par d’autres moyens, c’est-à-dire par des moyens militaires ; la guerre n’est donc pas un acte politique isolé des autres actes politiques, mais la continuation de la politique. Cette affirmation est si vraie qu’elle vaut non seulement pour la guerre bourgeoise, mais aussi pour la guerre de classe prolétarienne, pour la révolution prolétarienne.

Il reste que la paix bourgeoise succède tôt ou tard à la guerre bourgeoise, la paix impérialiste à la guerre impérialiste ; une paix que les bourgeoisies belligérantes déclarent toujours vouloir, mais continuent à faire la guerre pour accumuler le maximum d’avantages possibles dans les négociations de paix venir ; la paix sert à chaque bourgeoisie pour relancer son économie, pour la reconstruction d’après-guerre, et comme tous les gouvernements bourgeois le déclarent mensongèrement, pour une nouvelle ère de « prospérité ». Mais de même que la paix impérialiste n’est qu’un intervalle entre deux guerres, de même la prospérité bourgeoise temporaire n’est que la préparation d’une crise future, et d’une guerre future. Il suffit de jeter un coup d’œil aux décennies qui nous séparent de la fin de la seconde guerre mondiale pour comprendre que la réalité bourgeoise n’est pas autre chose.

Le 1er mai de cette année tombe lui aussi dans une période de guerre, cette fois aux frontières orientales de l’Europe, après la guerre de vingt ans de l’OTAN en Afghanistan, les guerres en Syrie, en Libye, en Irak, les guerres du Caucase et celles de Yougoslavie, également dans les pays d’Europe de l’Est, sans parler des guerres en Afrique.

 Au bout de deux décennies, la guerre partie de Serbie, de Croatie, de Bosnie, du Kosovo revient tonner dans le ciel de l’Europe. Les prolétaires, non seulement des pays directement impliqués dans les massacres de la guerre, mais aussi les prolétaires des pays impérialistes qui déclenchent la guerre et amplifient ses effets destructeurs, sont impliqués parce qu’ils doivent soutenir, « chez eux », l’effort de guerre de leur propre bourgeoisie ; et si les effets de la guerre provoquent des crises d’approvisionnement en ressources alimentaires ou énergétiques - comme aujourd’hui du fait de la guerre russo-ukrainienne - c’est un fait que ces effets frappent durement et de manière générale surtout les masses prolétariennes dans leurs conditions d’existence et dans leurs conditions de travail.

Toutes les bourgeoisies assurent que la guerre est évitable si un équilibre est trouvé entre les différents intérêts opposés représentés par les États et par les trusts économico-financiers ; et quand la guerre a éclaté, qu’elle peut être arrêtée à un certain moment grâce aux pressions que les États les plus puissants peuvent exercer par la voie diplomatique ou par des négociations secrètes. Il n’y a pas de doute que les voies diplomatiques et les négociations secrètes sont toujours présentes pendant les guerres, mais leurs résultats dépendent inévitablement de ce qui est le véritable but de la guerre : forcer les adversaires à accepter les conditions du plus fort.

La même chose se produit dans les conflits sociaux, et cela montre que la perspective d’un peuple où régneraient les facteurs d’unité nationale est totalement fausse : la réalité sociale est donnée dans tous les pays par l’antagonisme de classe qui oppose sans trêve la classe bourgeoise à la classe prolétarienne. La classe bourgeoise, en effet, est en lutte constante à la fois contre les bourgeoisies opposées dans une compétition qui a toujours été internationale, et contre les masses prolétariennes, même lorsque celles-ci ne se rebellent pas en utilisant leur propre force pour défendre leurs intérêts de classe.

La bourgeoisie possède une arme efficace qui a été dévoilée par le marxisme : la concurrence entre prolétaires. La concurrence commerciale qui pousse les capitalistes à produire plus et moins cher pour être compétitifs, rejaillit sur cette marchandise particulière qu’est le travail salarié dont tout capitaliste veut obtenir plus de productivité à moindre coût. La concurrence entre prolétaires, pour les bourgeois, est assimilée à la concurrence entre deux marchandises qui, dans ce cas, se heurtent sur le marché du travail : la plus productive l’emporte sur la moins productive qui, de ce fait, est moins bien payée, est utilisée de manière temporaire ou est simplement expulsée des cycles de production. Les emplois mal payés, les travailleurs précaires, le travail à la pièce, le travail au noir et le chômage augmentent. Même dans les périodes de prospérité économique, les capitalistes ont intérêt à creuser l’écart entre les couches les plus productives des travailleurs et toutes les autres ; ils ont intérêt, en même temps, à entretenir la masse des chômeurs au moindre coût car elle exerce spontanément - pour les besoins de la survie quotidienne - une forte pression sur la masse des travailleurs employés, en étant prête à travailler à des coûts inférieurs à ceux considérés comme nécessaires pour éviter dans la pauvreté absolue. La concurrence entre prolétaires ne disparaît pas dans les périodes de prospérité, et elle a cette particularité de s’aggraver dans toutes les périodes de crise économique. Mais étant donné que la société capitaliste rencontre des périodes de crise de plus en plus fréquentes, précisément à cause de sa grande vitalité productive, alors que les marchés ont de plus en plus de difficulté à absorber les quantités de plus en plus gigantesque de biens produits, la tendance à accroître de façon exponentielle l’exploitation du travail salarié affecte de plus en plus les conditions d’existence et de travail du prolétariat dans tous les pays.

C’est le capitalisme lui-même qui a fait, et continue à faire du prolétariat une classe internationale, non seulement parce que son développement international signifie aussi la croissance du nombre des masses prolétariennes à exploiter ; mais aussi parce que l’accroissement de la concurrence entre capitalistes accroît la quête de masses prolétariennes à exploiter à des coûts inférieurs à ceux des prolétaires des pays capitalistes avancés. C’est le capitalisme qui est à la source de l’internationalisation du prolétariat en tant que classe salariée, mais son but n’est certainement pas d’unir les prolétaires du monde en une seule armée en lutte. Cette tâche revient aux prolétaires eux-mêmes et c’est dans cette perspective que les communistes révolutionnaires agissent dans la société capitaliste.

Les luttes prolétariennes pour la défense des conditions de vie et de travail n’ont jamais disparu parce qu’elles sont une réaction spontanée contre des conditions matérielles intolérables ; mais elles sont constamment détournés vers le terrain de la collaboration interclassiste, grâce à la mise en place d’amortisseurs sociaux de toutes sortes grâce auxquels les bourgeoisies impérialistes, les plus grands exploiteurs des prolétaires et des peuples des pays dominés, peuvent traiter un mieux leurs les prolétaires nationaux. Ces luttes pouvaient se calmer en Angleterre, en Allemagne ou aux États-Unis ; mais elles éclataient en Russie, en Chine ou au Japon ; elles se sont régénérées dans les pays capitalistes avancés face aux graves crises économiques par la mobilisation de catégories particulières, comme les mineurs, les cheminots, les métallurgistes, les sidérurgistes, les enseignants, ou ont pris la forme de véritables révoltes sociales impliquant toutes les couches sociales les plus faibles, y compris la paysannerie et le prolétariat féminin et juvénile, comme dans les pays d’Amérique latine, du Moyen-Orient ou d’Asie du Sud-Est. Sous le capitalisme, les contrastes sociaux sont destinés à s’accroître, non pas tant parce que la «conscience» des prolétaires en général augmente, mais parce que leurs conditions matérielles deviennent de plus en plus intolérables.

Ce sont les facteurs matériels qui poussent à l’action, la « conscience » ne vient qu’ensuite ; comme l’affirme le marxisme, la conscience de classe qui anticipe le déroulement de la lutte entre les classes jusqu’à l’issue historique de la révolution prolétarienne ne se trouve que dans le parti de classe, l’organe qui s’est historiquement formé en l’espace de cent soixante-quinze ans de domination capitaliste dans le monde sur la base, précisément, du développement de la lutte des classes, des révolutions et des contre-révolutions et qui défend - au-dessus des flux et reflux de la lutte prolétarienne pour son émancipation sociale, au-dessus des tempêtes sociales, des crises et des défaites - la même orientation vers l’issue révolutionnaire.

Pour que les prolétaires recommencent à se considérer non pas comme un accessoire de la machine productive du capitalisme, non comme une pièce de rechange pour celle-ci, mais comme une force sociale qui a une tâche historique grandiose - celle de vaincre à jamais la société capitaliste - ils doivent retrouver le terrain de la lutte de classe en plaçant les revendications unificatrices traditionnelles classistes au centre de leurs combats, car elles impliquent tous les prolétaires, quels que soient leur catégorie, leur sexe, leur âge, leur nationalité :

 

-Réduction drastique du temps de travail quotidien

-Hausse des salaires, plus élevée pour les catégories les moins bien payées

-Diminution substantielle des rythmes et de la pénibilité du travail

-Introduction et augmentation systématique des mesures de sécurité au travail

-Salaire intégral pour les licenciés et les chômeurs

-Egalité des salaires et réglementations entre prolétaires masculins et féminins, entre natifs et immigrés.

 

Le cadre dans lequel ces revendications ont une signification de classe est celui de la lutte contre la concurrence entre prolétaires qui ne peut être menée avec succès qu’avec des organisations prolétariennes indépendantes de la bourgeoisie et de multiples formes de collaboration interclassiste. Ces organisations ne peuvent renaître que de la lutte de classe, c’est-à-dire de la lutte qui vise à défendre exclusivement les intérêts de classe du prolétariat sur le terrain économique immédiat comme sur le terrain politique général contre la classe dirigeante et son État. La lutte de classe du prolétariat dont l’objectif est la conquête du pouvoir politique et l’instauration, contre la dictature du capital, de la dictature du prolétariat, repose nécessairement sur les grandes masses prolétariennes organisées sur le terrain de la défense économique immédiate, qui ont accumulé au cours du temps les enseignements fondamentaux de la lutte anticapitaliste.

L’histoire du mouvement ouvrier a enseigné que les intérêts de classe prolétariens sont incompatibles avec ceux de la classe dirigeante bourgeoise. Cette dernière utilise toutes les armes qu’elle a accumulées dans la lutte contre le prolétariat - du chantage économique à la paix sociale, de l’engagement politique alimenté par la démocratie dans ses milliers d’institutions à la répression policière et militaire, de la compétition entre catégories, secteurs, âge, sexe, nationalité, convictions politiques ou religieuses aux mythes de carrière et de professionnalisme de plus en plus élevé - afin d’obtenir le maximum de productivité et de compétitivité de l’exploitation de la main-d’œuvre salariée, donc le maximum de profit sur les marchés nationaux et internationaux. Pour la bourgeoisie, habituer le prolétariat à se plier aux exigences du capitalisme en temps de paix signifie habituer le prolétariat à se plier aux exigences du capitalisme en temps de guerre.

La concurrence bourgeoise de plus en plus impitoyable n’exclut pas, au contraire, l’appel des masses prolétariennes à « l’unité nationale » ; cette « unité nationale » est vitale pour la bourgeoisie car elle essaye ainsi de prévenir tout conflit social, toute rébellion prolétarienne, toute agitation ouvrière qui entrave le grand plan de la classe dominante : utiliser son propre prolétariat national non seulement comme force productive en soutien de son économie en crise, mais comme une masse de choc dans la guerre militaire. Et quand les moyens de l’idéologie bourgeoise, les moyens légaux et pacifiques, ne suffisent plus à convaincre les masses prolétariennes d’accepter les exigences du capitalisme, alors la bourgeoisie passe aux mesures d’un contrôle social toujours plus étroit et elle déchaîne ses moyens classiques de répression contre les prolétaires qui se révoltent pour ne pas devenir de la chair à canon après avoir été tués de fatigue au travail.

La crise dans laquelle est rentré le capitalisme mondial concentre de plus en plus son épicentre en Europe, berceau du capitalisme international, berceau de l’esclavage salarié répandu dans le monde, berceau de l’impérialisme moderne, berceau des massacres de millions de prolétaires dans les guerres bourgeoises. La guerre russo-ukrainienne est là pour démontrer que le capitalisme n’a d’autre moyen de lutter contre ses propres crises que de passer de la guerre économique et commerciale à la guerre tout court. Et tandis que les prolétaires ukrainiens et les prolétaires russes s’entretuent, les bourgeois, les capitalistes, les boursiers, les oligarques, les grands milliardaires du monde entier continuent de se remplir les poches aujourd’hui avec les profits tirés de la guerre, en attendant de le faire demain avec ceux issus de la reconstruction d’après-guerre.

Contre l’unité nationale avec la bourgeoisie, antichambre cynique d’une exploitation plus intense des masses prolétariennes en temps de paix, et de la mobilisation militaire générale en temps de guerre, le prolétariat n’a qu’une alternative : la reconquête du terrain de la lutte de classe d’abord contre sa propre bourgeoisie nationale, sur laquelle il peut fonder sa force de classe internationaliste.

 

-Contre tout nationalisme, contre toute mobilisation guerrière, prolétaires de tous les pays unissez-vous !

-Contre la guerre bourgeoise, contre la guerre impérialiste, les prolétaires ont leur propre alternative historique : la guerre de classe, la révolution prolétarienne !

-Que 1er mai redevienne la journée internationale de la lutte du prolétariat dans tous les pays, contre toutes les bourgeoisies dominantes !

 

30/04/2022

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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