Lettre d’Italie

Dans la société du capital, le travail est une condamnation à mort pour les prolétaires !

Ce n’est que sur le terrain de la défense exclusive des intérêts ouvriers immédiats de classe que l’on peut s’opposer au massacre continu sur les lieux de travail !

(«le prolétaire»; N° 552; Février-Mars-Avril 2024)

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Le bulletin de guerre sur les accidents et les morts au travail en Italie, que les institutions bourgeoises établissent chaque mois, raconte toujours la même histoire : les gens meurent au travail : Et qui meurt ? À 99 %, ce sont les ouvriers.

En 2023, selon l’INAIL (Institut national d’assurance contre les accidents du travail), qui ne considère dans ses calculs que les travailleurs assurés, il y a eu 1 041 morts au travail ; selon la recherche la plus précise de l’Observatoire de Bologne de l’ex-ouvrier Carlo Soricelli (https://cadutisullavoro. blogspot. com/), qui tient également compte des morts des travailleurs illégaux et des immigrés que le gouvernement aime appeler « clandestins » et qui recueille les nouvelles des journaux locaux de toute l’Italie, ce serait 1 485 morts : plus de 4 morts par jour :

C’est la norme depuis des décennies : on oscille toujours entre 3 et 4 morts au travail par jour : Et les secteurs où l’on meurt le plus sont toujours les mêmes : la construction et l’agriculture, où il y a une présence massive de travail au noir et de main-d’œuvre immigrée.

Quelle a été et quelle est la réponse des syndicats, à commencer par la CGIL ? Il faut augmenter les contrôles de sécurité au travail et diminuer la sous-traitance. Y a-t-il déjà eu une grève générale contre les morts au travail impliquant les ouvriers de tous les secteurs, et pas seulement les secteurs les plus touchés ? Jamais : Mais toujours, de la part des gouvernements, des associations patronales, des partis parlementaires, des syndicats collaborationnistes, il n’y a eu que des promesses d’action pour qu’il n’y ait plus de morts au travail ? Inutile de dire que ces promesses n’ont jamais trouvé de résultat concret :

Hier, 16 février, à 8h45, sur le chantier de la zone de Rifredi/Novoli à Florence, où se construit un maxi-supermarché Esselunga de plusieurs étages, un drame s’est produit : alors qu’une pompe achemine le béton de la bétonnière vers les étages les plus élevés de la structure grâce à un long bras mécanique, une poutre en béton de 20 mètres de long située au quatrième étage cède et s’effondre, écrasant tout ce qui se trouve en dessous jusqu’au sol, détruisant les préfabriqués situés en contrebas et s’abattant sur les ouvriers qui y travaillent : jusqu’à maintenant, quatre personnes ont été retrouvées mortes, une est disparue (pour laquelle il n’y a plus d’espoir à l’heure actuelle), deux sont gravement blessées et une légèrement blessée.

Le chantier appartient à La Villata Spa (dont le président est Angelino Alfano, ex-ministre de la justice du gouvernement Berlusconi IV, ex-ministre de l’intérieur des gouvernements Letta et Renzi, ex-ministre des affaires étrangères du gouvernement Gentiloni), propriété des Caprotti, patrons d’Esselunga, qui a confié les travaux à Attività Edilizie Pavesi, la même entreprise de construction qui, en février 2023, à San Benigno di Genova, a été responsable d’un double accident, toujours sur un chantier d’Esselunga, lorsqu’une rampe de parking s’est effondrée, blessant trois ouvriers, et quelques semaines plus tard, une conduite de gaz a été endommagée au cours d’une excavation, nécessitant l’intervention rapide des pompiers. Quelques mois plus tard, en avril, toujours à San Benigno, un ouvrier est renversé par un grand portail et hospitalisé d’urgence pour des blessures à la tête (l’ASL – Autorité sanitaire locale – avait mis la zone sous séquestre, le procès est toujours en cours, mais le supermarché a tout de même été ouvert en mai :).

Ce qui est devenu une constante, surtout sur les grands chantiers, c’est l’attribution des travaux de construction à une série interminable et en cascade de contrats et de sous-contrats. D’après les comptes-rendus du chantier de Florence, il y a au moins 34 entreprises de sous-traitance, et généralement le plus grand nombre de victimes se trouve parmi les travailleurs des sous-traitants de troisième niveau.

Ce système a été inventé – et bien sûr encadré par des lois ad hoc – pour limiter les coûts, en commençant par la société commanditaire – dans ce cas Esselunga – ce qui signifie que chaque entrepreneur et sous-traitant soumettent des offres au plus bas pour gagner leur « compétition » avec les autres entreprises : ce qui, à son tour, signifie moins de sécurité au travail, salaires plus bas, travail au noir, esclavagisme salarié, économies sur les matériaux utilisés pour les préfabriqués, sur l’équipement, etc., etc. Comment s’étonner que des « accidents » se produisent ? En réalité, les décennies d’accidents du travail montrent qu’ils sont toujours prédits, comme sont prédits leur cortège de blessés et de décès : il y a toujours beaucoup plus de prolétaires dans des conditions désespérées et à la recherche d’un emploi qu’actuellement nécessaires... Quand un travailleur meurt, il y en a toujours un autre pour le remplacer : les patrons ne le disent jamais, mais c’est exactement ce qu’ils font.

À quoi servent les travailleurs si ce n’est à risquer leur vie pour une bouchée de pain afin d’engraisser le portefeuille des patrons ? La classe patronale pense toujours en ces termes, même si elle se gargarise des droits et de la dignité des travailleurs.

La dignité des travailleurs ne sera jamais assurée par les patrons, comme leur vie ne sera jamais assurée. Pour défendre leur vie et leur survie, les travailleurs doivent d’abord lutter contre la concurrence entre eux, systématiquement entretenue par la bourgeoisie. La vie des travailleurs n’est sauvée ni s’ils sont payés plus que les autres, ni s’ils sont payés moins que les autres ; si un entrepôt brûle, si un train écrase des travailleurs sur les voies, si une usine chimique explose, si un travailleur est renversé sur le chemin du travail ou sur le chemin du retour, peu importe qu’il soit chef, ouvrier ou immigré : comme à la guerre, la mort au travail ne regarde personne en face. C’est l’exploitation du travail salarié qui est à la base de l’insécurité de la vie prolétarienne, à la base de la précarité constante du travail et donc des salaires : les capitalistes n’ont pas seulement entre les mains la possibilité de donner ou de ne pas donner du travail aux ouvriers, ils ont entre les mains leur vie, qu’ils travaillent ou qu’ils soient au chômage, qu’ils soient « italiens » ou « immigrés ».

La lutte des ouvriers doit mettre la défense de leur vie au premier plan, et elle ne peut le faire en se leurrant sur les belles paroles des syndicats collaborationnistes face à chaque mort au travail, et pire encore sur celles des politiciens vendus au maintien d’un régime politique et économique qui tue démocratiquement ses esclaves salariés. La lutte des travailleurs doit se recentrer non seulement sur l’augmentation des salaires et la réduction de la journée de travail, mais aussi sur la sécurité au poste de travail. Et ce ne sera jamais la grève de deux heures à la fin d’une équipe qui fera peur aux patrons ; si elle se limite alors à l’entreprise où les décès ont eu lieu ou au secteur auquel cette entreprise appartient, elle ne les fera que rire. La solidarité de la classe ouvrière n’est forte que si elle va au-delà de toutes les limites et barrières que la bourgeoisie a érigées pour mieux contrôler la force de travail qu’elle exploite. Tant que les patrons n’auront pas peur de la réponse prolétarienne à leur arrogance, à leurs faits et gestes au fil de leurs affaires, tant que les patrons pourront compter sur le pompiérisme des syndicalistes collaborationnistes et des politiciens vendus aux capitalistes les mieux payant, les prolétaires continueront à subir toutes les pires conséquences du régime capitaliste et bourgeois, en temps de paix comme de guerre.

La renaissance du mouvement de classe du prolétariat, qui seul qui défendra efficacement les intérêts prolétariens dans le présent et l’avenir, ne passe pas par des lois bourgeoises, par des réformes de telle ou telle loi, par des ergotages au seul profit des avocats, et par de prétendues batailles parlementaires et électorales : elle passe par la lutte classiste, la lutte dans laquelle les prolétaires se battent pour la défense exclusive de leurs propres intérêts de classe, contre tout partage, toute cohésion, toute participation qui verrait sur le même front les prolétaires et les bourgeois, grands ou petits. Les prolétaires victimes d’accidents et de morts au travail n’ont pas été malchanceux, ils ont simplement été sacrifiés par la bourgeoisie sur l’autel de ses profits !

 

17/02/2024

 

 

Parti Communiste International

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