Sur les «journées d’action anti-guerre»

Prague, 24-26 mai 2024

(«le prolétaire»; N° 553; Mai-Juin-Juillet 2024)

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Un certain nombre de groupes, généralement de tendance anarchiste (comme Antipolitika des Balkans) et quelques révolutionnaires autoproclamés (comme Antipolitisch-Sozialrevolutionären Tendenz d’Allemagne), qui se réfèrent à l’internationalisme et à la lutte contre la guerre impérialiste, se sont réunis à Prague à l’occasion du « congrès anti-guerre » organisé par actionweek.noblogs.org, pour « confronter » leurs idées au sujet de la guerre, des moyens de s’y opposer, pour rechercher des bases communes de manifester leur opposition et stimuler ainsi les masses populaires et le prolétariat. Nous avions déjà évoqué cette initiative dans le  numéro 181 de il comunista, notre organe de presse en Italie, en soulignant les aspects fondamentaux de la question « guerre ou révolution », que nous reprenons aujourd’hui après la fin du « congrès anti-guerre de Prague ».

 

L’appel à la « résistance à la guerre » et aux « pratiques anticapitalistes » est fondamentalement ce qui unit toutes ces organisations, sans aucune mention des objectifs historiques de la classe prolétarienne et de ceux de la classe dominante bourgeoise. La question centrale réside dans l’affrontement entre d’une part les défenseurs de la nation, des Etats et du capitalisme, et d’autre part la classe sociale, et dans l’antagonisme « entre les simples soldats et les officiers, entre les ouvriers et les patrons, entre le prolétariat et la bourgeoisie ». Une telle approche rappelle le concept ressassé de la société bourgeoise divisée entre « riches » et « pauvres », entre ceux qui sont soumis aux décisions du pouvoir central (les fameuses masses populaires, donc l’énorme majorité) et ceux qui détiennent le pouvoir central, c’est-à-dire l’État (la minorité des  riches). Que ressort-il de ces formulations tout à fait génériques – sur lesquelles s’accordent la grande, la moyenne et la petite bourgeoisie, les prêtres, les commerçants, les intellectuels, les politiciens de gauche et de droite, les sous-prolétaires, etc. ? Une plate-forme de lutte, une série de revendications, un programme politique ? Rien de tout cela. C’est l’ « action directe » contre la guerre qui est invoquée, ne considérant toute guerre que comme l’expression d’une violence armée en tant que telle. Mais quelle action directe, de qui et par qui ? A ce Congrès, s’ouvrit donc un débat sur les actions à organiser et sur la manière de le faire, et, après avoir constaté que les actions individuelles de « résistance » à la guerre (fuite, désertion, corruption pour les mettre en œuvre, petits sabotages, etc.) ne les arrêtent pas mais  aggravent par contre la répression de l’Etat, les débateurs finirent toutefois espérer les coordonner dans une perspective... toute à construire...

Toutes leurs paroles n’ont aucun lien avec la réalité historique de la société capitaliste, de sa formation historique sur la base du développement des forces productives et de la division de la société en classes ; elles n’ont aucune base historique entre guerre impérialiste et révolution, entre lutte de classe du prolétariat et révolution, entre révolution et guerre civile, entre prise violente du pouvoir politique, renversement de la dictature bourgeoise et impérialiste et instauration de la dictature du prolétariat et, bien sûr, ne font aucune mention spécifique du parti de classe du prolétariat qu’elles rejettent au contraire de manière générale, comme toute forme de parti.

Comme il convient à tout groupe qui se réfère plus ou moins directement à l’anarchisme, l’appel à « unir les forces » a été lancé dans le plein respect de « l’autonomie politique » de chaque groupe et de chaque individu. Comme il est écrit dans l’appel à participer à ce congrès, les promoteurs entendent rester bien séparés de tous les partis politiques, de toutes les structures étatiques et s’unir contre tous les États (1). En réalité, leur refus du parti politique et de l’Etat en tant qu’organismes centralisateurs se base sur le rejet par principe de toute autorité, donc aussi de l’autorité du parti communiste révolutionnaire et de la dictature du prolétariat exercée par le parti de classe. La seule « autorité » admissible à leurs yeux est celle de la « conscience individuelle », à laquelle on s’adresse pour convaincre chaque individu – après avoir constaté les horreurs des guerres, de l’exploitation et de la misère, et avoir décidé de s’y opposer – de manifester son désaccord, jusqu’aux actions de « sabotage », et en se regroupant dans l’action avec d’autres « consciences » individuelles, pour se libérer de l’oppression de toute autorité, de tout parti, de tout État.

Face à un prolétariat plusieurs fois vaincu dans l’histoire passée tant sur le terrain révolutionnaire que sur celui de la défense économique immédiate, replié sur lui-même et berné depuis des décennies, surtout dans les pays occidentaux du capitalisme impérialiste, par les rengaines démocratiques qui reposent sur quelques avantages sociaux acquis grâce à l’exploitation bestiale des prolétaires des pays les plus faibles, ces fidèles actuels de la « conscience individuelle » et de l’action « directe » sont, au plus haut niveau, les conservateurs de la théorie des vertus de la spontanéité prolétarienne, pourtant vaincue théoriquement et politiquement par le marxisme depuis l’époque de Proudhon et de Bakounine. Au lieu de regarder en avant, vers la révolution communiste selon le matérialisme historique et dialectique marxiste, ces nouveaux antimilitaristes et porte-drapeaux de l’anti-guerre ont fait mille pas en arrière par rapport au concept même de lutte des classes. En revanche, ce concept, la bourgeoisie l’a très bien compris et elle sait aussi par expérience historique que la classe sociale dont elle craint la révolution, la classe prolétarienne, ne pourra jamais atteindre sa victoire de classe en l’absence de l’influence et de la direction décisive du parti communiste révolutionnaire, que nous appelons simplement parti de classe. Pour nous, en effet, le prolétariat, à l’échelle mondiale, ne peut pas se passer d’une théorie révolutionnaire, d’une théorie unique de la révolution, d’un programme politique unique et d’un parti de classe unique dirigeant la révolution mondiale et la dictature de classe dans les pays où la révolution a abouti au renversement victorieux de l’Etat et du pouvoir politique de la bourgeoisie.

« Le seul moyen de sortir du cauchemar des guerres et des paix capitalistes – conclut l’appel susmentionné – réside dans le réveil collectif : nous devons analyser et saboter toutes les machines de guerre, renverser ses représentants et reprendre notre pouvoir en tant que créateurs du monde. »

Que les guerres et les paix capitalistes soient un cauchemar pour la grande majorité des peuples ne fait aucun doute ; mais croire que les guerres et les paix capitalistes ne sont que le produit de la « machine de guerre » mise en place par la bourgeoisie et ses États, sans tenir compte des déterminations économiques et historiques de la formation des classes et des États et de la lutte entre les classes, conduit inévitablement à élucubrer sur des « actions de sabotage » qui ne chatouillent même pas les États bourgeois, tout en défendant un autre type de sabotage, celui-là réellement néfaste à la lutte du prolétariat, le sabotage de la lutte des classes, la seule lutte dont l’histoire a montré qu’elle était décisive si, dans sa perspective de reprise et de développement, les prolétaires se réorganisaient à partir de la défense de leurs intérêts de classe immédiats, la seule lutte qui permette aux prolétaires de se reconnecter avec la théorie de la révolution sans laquelle ils ne pourront jamais marcher vers l’émancipation réelle de l’exploitation par la bourgeoisie et vers la société sans classe, la société de l’espèce.

Pourquoi parlons-nous d’élucubrations ? Voici ce qu’écrivent les promoteurs de ces journées « anti-guerre » : « Nous sommes intéressés aux moyens de saboter les guerres, de priver nos ennemis de ressources, de miner la capacité des États et de leurs armées à poursuivre les guerres ». On oublie seulement que la guerre impérialiste n’est que la continuation de la politique impérialiste de chaque État bourgeois en lutte contre ses adversaires sur le marché mondial ; on oublie que la guerre par des moyens militaires n’est qu’une des manifestations du capitalisme impérialiste, comme l’est de même la paix impérialiste. Pour la bourgeoisie, les guerres qu’elle mène englobent la guerre de concurrence, la guerre commerciale, la guerre monétaire et financière, la guerre des frontières, la guerre idéologique : toutes ces guerres font partie intégrante de la guerre de domination de la classe bourgeoise qui, dans la phase impérialiste, se caractérise de plus en plus par un militarisme qui ne peut pas faire disparaître toutes les contradictions qu’engendre lui-même le mode de production capitaliste.

Dans chaque guerre, le fait que la bourgeoisie élève le nationalisme au rang d’idéologie de la défense de sa nation, de sa patrie, montre une contradiction supplémentaire : elle est nationaliste parce qu’elle lutte en tant qu’État contre la bourgeoisie d’autres États en concurrence sur le marché international, mais elle devient en quelque sorte « internationaliste » (2) en tant que classe parce que le développement du capital financier oblige toute bourgeoisie à entremêler son destin national avec le capital monopoliste et multinational ; elle est nationaliste parce qu’elle doit impliquer et enrégimenter son prolétariat dans la guerre pour défendre ses intérêts nationaux spécifiques en considérant toutes les bourgeoisies non alliées comme des ennemis, des agresseurs, mais elle devient « internationaliste » lorsqu’elle est confrontée au danger de perdre le pouvoir politique à cause de la lutte révolutionnaire de son prolétariat, même si elle fait la guerre à d’autres bourgeoisies ennemies.

Pour les prolétaires révolutionnaires, être internationaliste, c’est être antipatriote et lutter contre le nationalisme dans toutes les situations, non seulement de guerre mais aussi de paix ; c’est tisser un réseau de solidarité et d’organisation de classe, c’est-à-dire anti-bourgeois et, bien sûr, anticapitaliste, aussi bien en temps de paix qu’en temps de guerre, mais avec un objectif bien précis : la révolution prolétarienne pour la conquête du pouvoir politique. Mais qu’est-ce que la révolution prolétarienne si ce n’est la guerre de classe du prolétariat contre la bourgeoisie ? Une guerre de classe non violente, une guerre de classe qui ne soit pas un affrontement armé entre la classe prolétarienne et la classe bourgeoise, est-elle possible ? Les révolutionnaires prolétariens ne peuvent pas être contre la violence tout court, contre la guerre tout court. L’histoire des sociétés s’est développée à travers le développement des forces productives qui, à un certain point, a conduit à la division de la société en classes distinctes, les classes qui possédaient tout et les classes qui ne possédaient rien ou presque. C’est le développement des forces productives, et leur progrès, qui a conduit, au fil des millénaires, à la formation de sociétés qui ont toujours plus simplifié les rapports entre les classes, jusqu’à la société bourgeoise capitaliste qui se distingue non seulement par la formation des deux principales classes antagonistes, mais par l’universalisation du mode de production capitaliste qui fait que, partout dans le monde, le capitaliste est le capitaliste et le prolétaire, c’est-à-dire le travailleur salarié, est le prolétaire. Donc, l’internationalisme prolétarien, comme le soutient le marxisme, est représenté par une seule théorie révolutionnaire, une seule perspective révolutionnaire et un seul parti révolutionnaire qui représente, à l’heure actuelle, le but historique de la lutte des classes et la conscience de ce but.

La lutte de classe du prolétariat se développe historiquement dans la lutte révolutionnaire pour la conquête du pouvoir politique : c’est une guerre de classe et non une guerre impérialiste. Pour conquérir le pouvoir politique, il faut affronter la force armée de l’État bourgeois et les milices armées des patrons qui défendent leur propriété. Une fois le pouvoir politique conquis, on ne peut pas laisser debout l’État bourgeois avec toutes ses institutions, car elles continueraient à travailler contre la révolution prolétarienne : l’Etat bourgeois et toutes ses institutions doivent donc être détruits et remplacés par des organismes du pouvoir exclusif du prolétariat, c’est-à-dire l’Etat prolétarien (qui, comme le dira Engels, est un demi-Etat parce que dans la perspective de la révolution communiste mondiale, l’Etat en tant qu’organe centralisé de répression des classes dominées s’éteindra avec l’extinction des classes), l’Etat des Conseils ouvriers ou d’autres organismes similaires que la lutte révolutionnaire elle-même engendrera au cours de son déroulement mondial.

La conquête du pouvoir politique par le prolétariat révolutionnaire est nécessaire pour transformer l’économie capitaliste en économie socialiste, en économie communiste, et la dictature du prolétariat exercée par le parti communiste révolutionnaire est nécessaire non seulement pour réprimer les régurgitations et les tentatives de restauration bourgeoise (d’ailleurs, la bourgeoisie a fait exactement la même chose à l’égard du féodalisme), mais aussi pour toutes les interventions despotiques nécessaires à la transformation de l’économie capitaliste, donc des rapports économiques et sociaux bourgeois basés sur la propriété privée et le mercantilisme, en une société socialiste et, enfin, une fois les classes et l’État éteints, en une économie communiste, à travers une série d’étapes de réorganisation de l’économie selon une programmation centralisée capable de prévoir les besoins réels de la société humaine. Un programme économique qui prévoit l’élimination de toute production inutile et nuisible, de tout gaspillage, l’utilisation des techniques de production les plus éprouvées afin d’alléger au maximum la fatigue humaine, l’implication de toute l’espèce humaine dans le travail en diminuant au maximum le temps de travail quotidien de chaque individu et en augmentant en progression géométrique le temps dont dispose chaque individu pour ses passions, pour l’approfondissement de ses connaissances, pour les divertissements et l’oisiveté. Le communisme n’est pas un imaginaire pays de cocagne, ce n’est pas le paradis sur terre, c’est simplement la société enfin humaine qui a définitivement vaincu la déshumanisation des sociétés de classes et dont les rapports avec la nature s’établiront selon une satisfaction matérielle des besoins de la vie sociale avec la réalité matérielle des forces et capacités de cette nature. Ce que les initiateurs de ces « journées d’action anti-guerre » réunis à Prague ont abandonné, c’est même le simple effort de comprendre la réalité de la société bourgeoise. Les partis politiques ont-ils échoué, les syndicats ont-ils échoué, les centres sociaux ont-ils échoué, les collectifs ont-ils échoué ? En somme, toute tentative d’organisation formelle de la lutte contre l’état actuel des choses – au-delà de leur approche démocratique, opportuniste, spontanéiste – est rejetée comme une expérience négative. Que faire alors de différent, de non-bourgeois, de non-capitaliste ?

Marche arrière : il y a les riches et les pauvres, les exploités et les exploiteurs, bref, des individus, et si l’on parle encore épisodiquement de « classe », ce n’est pas du point de vue de l’histoire des sociétés, mais du point de vue de la classification de la masse humaine en couches sociales si chère à la statistique bourgeoise. Ces « actionnistes » très volontaires, mais complètement désorientés, ont réussi à remonter plus loin encore que les bourgeois de l’époque de Marx, qui avaient déjà découvert que la lutte des classes existait dans la société moderne. Il a fallu Marx pour comprendre que le développement historique de la lutte des classes conduisait inexorablement à la révolution de la classe prolétarienne contre la classe dominante. Pourquoi la classe prolétarienne ? Parce que c’est la classe des travailleurs salariés – ceux sans lesquels le capitalisme n’existerait pas, ceux qui produisent tout ce qui constitue la richesse sociale, mais qui ne possèdent rien d’autre que leur force de travail que le capital exploite dans le seul but d’en extraire la plus-value. Travail salarié et capital sont les deux faces d’une même médaille, on ne peut garder l’un et supprimer l’autre, ils se combinent mutuellement, l’un domine et l’autre est dominé, mais ils ne « vivent » qu’en symbiose, fût-elle forcée. La révolution prolétarienne a pour tâche de détruire le pouvoir politique de la classe dominante afin de pouvoir intervenir par la force dans les rapports bourgeois de production et sociaux ; pour pouvoir changer le monde, il ne suffit pas de s’imaginer libre d’agir individuellement, encore moins de penser que le passage d’une société à l’autre se fera automatiquement par la mise en œuvre d’actes de sabotage et de terrorisme, comme si le bon résultat final était la somme d’un nombre indéterminé d’actes de ce type.

Il est incontestable que les expériences historiques des partis socialistes, sociaux-démocrates et communistes à ce jour ont été généralement négatives, mais ce n’est pas parce qu’il s’agissait de partis, c’est-à-dire d’organes politiques constitués sur une base théorique et programmatique définie. Les échecs ne sont pas dus au fait d’être ou ne pas être des partis politiques, mais au fait que dans la lutte que la bourgeoisie mène contre le prolétariat, elle utilise tous les moyens puissants qu’elle s’est donnés en tant que classe dominante, à commencer par l’État, la force armée, l’école, l’église et, enfin, le pouvoir économique qui lui permet d’exercer un chantage sur la classe prolétarienne en général et d’en corrompre des pans entiers en attisant la concurrence entre prolétaires. Les partis, les syndicats et tous les organismes sociaux sont influencés par la bourgeoisie parce qu’ils sont soumis à la pression de tous ces moyens. Comment le prolétariat échappera-t-il à l’influence de la bourgeoisie qui, entre-temps, est devenue beaucoup plus puissante qu’elle ne l’était aux XIXe et XXe siècles ? Certainement pas en se repliant sur l’individualisme, comme le suggèrent les promoteurs de ce « congrès », c’est en effet une autre façon de céder totalement à l’influence idéologique et pratique de la bourgeoisie dominante, et ainsi la façon la plus directe et la plus sûre d’être totalement entre les mains de la bourgeoisie.

La classe prolétarienne repose sur trois facteurs forgés par l’histoire de la lutte des classes : 1) le fait d’être indispensable à la production capitaliste et à la valorisation du capital, à travers précisément l’extorsion de la plus-value que le capital opère dans chaque journée de travail du prolétaire salarié ; 2) le nombre toujours croissant de prolétaires à l’échelle mondiale ; 3) La théorie marxiste, forgée au milieu du XIXe siècle, qui ne s’est pas contentée d’interpréter et d’expliquer la réalité sociale, mais a déduit scientifiquement du développement inexorable des forces productives et des rapports de production eux-mêmes non seulement les caractéristiques spécifiques du capitalisme que même les bourgeois ne savaient expliquer, mais aussi l’évolution historique inévitable de la lutte entre les classes vers le dépassement nécessaire et violent de la société divisée en classes pour atteindre la société sans classes, le communisme.

Le prolétariat dans son ensemble est-il conscient d’avoir à s’appuyer sur ces trois facteurs ? Il est arrivé aux deux premiers, et il y est arrivé par l’expérience directe. La grève, si elle est organisée et menée avec des moyens et des méthodes classistes, pour la défense exclusive des intérêts immédiats prolétariens, affecte les rapports entre salariés et capitalistes, en causant des dommages aux capitalistes, et elle est en même temps plus efficace si elle est étendue à un plus grand nombre de catégories et de secteurs économiques. Le nombre et l’union sont une force dans la mesure où ils sont organisés et dirigés en fonction des intérêts exclusifs du prolétariat, excluant a priori la collaboration de classe avec les capitalistes et leur pouvoir politique, et ils constituent également la base de la solidarité de classe entre prolétaires de secteurs économiques et de pays différents. Ces deux premiers facteurs font partie de la lutte que le prolétariat a été et est poussé spontanément à entreprendre pour défendre ses conditions immédiates d’existence et de travail. Le troisième facteur est la théorie révolutionnaire, qui se fonde sur la lutte des classes entre le prolétariat et la bourgeoisie ; elle ne naît pas de la lutte immédiate du prolétariat, mais est le résultat de tout ce que l’humanité a créé de meilleur au cours du XIXe siècle (Lénine), le siècle du capitalisme et de la révolution bourgeoise : la philosophie allemande, l’économie politique anglaise et le socialisme utopique français. Le marxisme a fusionné le meilleur de ces trois parties intégrantes dans la doctrine du communisme révolutionnaire, surmontant toutes leurs limites, fournissant ainsi à la seule classe historiquement révolutionnaire que le capitalisme a créée, le prolétariat moderne, la conscience de son développement historique en tant que classe révolutionnaire, définissant matériellement les tâches que le prolétariat doit assumer non seulement pour sa propre émancipation de classe, mais pour l’émancipation de toute l’humanité de l’esclavage du mercantilisme, de la propriété privée, et du pouvoir de classe lui-même.

Le marxisme est la science de la révolution et sa force ne consiste pas à s’appuyer sur une classe – comme l’a fait la bourgeoisie – qui, au sein de l’ancienne société, de l’ancien mode de production, a commencé à construire une économie plus avancée et sur laquelle se fondent ses revendications politiques de classe. L’économie bourgeoise s’est développée à l’intérieur des formes féodales en utilisant les formes existantes de la propriété privée et de l’État, en les adaptant à ses propres intérêts et en les révolutionnant lorsque ces formes ne correspondaient plus au développement des forces productives que le capitalisme avait déclenché grâce au travail associé et aux découvertes géographiques. L’économie socialiste ne pourra voir le jour qu’après avoir détruit le pouvoir politique bourgeois qui défend par la force le mode de production capitaliste. C’est pourquoi le prolétariat est obligé, historiquement, de faire d’abord la révolution politique anticapitaliste et seulement ensuite, grâce à la dictature de classe, d’intervenir dans l’économie capitaliste pour la transformer en économie socialiste et, finalement, communiste. Mais la conscience de ces objectifs historiques est représentée par un organe politique spécifique, le parti de classe, détenteur de la théorie marxiste, de la science marxiste. Rejeter le parti de classe, donc le marxisme, signifie céder entièrement à ce que l’on considère à juste titre comme l’ennemi de tous les exploités, et faire son jeu antiprolétarien.

 


 

(1) Cf. https//:www.autistici.org/ tridnivalka/aw/ 2024-congres-anti-guerre-prague-24-au-26-mai-2024

(2) « Internationaliste » dans le sens où elle agit internationalement pour défendre ses intérêts, dans le sens formel où elle ne peut pas ne pas prendre en compte et se confronter aux conditions matérielles internationales du développement impérialiste du capitalisme et du danger que représente internationalement la lutte de classe du prolétariat.

 

 

Parti Communiste International

Il comunista - le prolétaire - el proletario - proletarian - programme communiste - el programa comunista - Communist Program

www.pcint.org

 

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