Un nouveau gouvernement anti-ouvrier et militariste
(«le prolétaire»; N° 554; Août-Sept.-Oct. 2024)
AUSTERITE ANNONCEE
Après une interminable période de discussions et de négociations, un nouveau premier ministre a finalement été désigné et un nouveau gouvernement formé ; selon les dires de Barnier ce sera un gouvernement de « changement et de rupture ».
Comme chacun l’a constaté c’est le gouvernement le plus à droite depuis des années ; formé autour de membres du parti Les Républicains, il inclue entre autres en son sein un Retailleau qui s’était signalé en durcissant la dernière loi immigration au point de la faire voter par les députés du RN : ses premières déclarations sur le « rétablissement de l’ordre » ont été saluées par l’extrême droite ; mais Barnier avait déjà dit que les frontières étaient devenues des « passoires »…
Dans son discours de politique générale le premier ministre a annoncé la couleur : face à l’accroissement du déficit public qui devrait atteindre les 6% du PIB à la fin de l’année selon le ministre du budget (alors que les règles européennes stipulent qu’il ne devrait pas dépasser les 3%), une cure d’austérité s’impose pour rétablir les équilibres financiers ; il faut réduire les dépenses et augmenter les recettes de l’Etat. Comme il n’est pas question de réduire certains budgets comme celui de la défense (essentiel pour l’impérialisme français dans la situation internationale actuelle), il faudra tailler dans les dépenses sociales ; comme il n’est pas question de revenir sur la politique suivie par tous les gouvernements de diminuer les impôts sur les entreprises (nécessaire pour maintenir et améliorer le taux de profit), on se contentera d’un « prélèvement exceptionnel » et limité, sur les grandes entreprises et les grandes fortunes – comme le préconisait la Banque de France. En fait de changement et de rupture, c’est la continuité avec les gouvernements précédents qui domine : la continuité avec une orientation toujours plus droitière, toujours plus anti-ouvrière et répressive.
CONTINUITE DANS LE SOUTIEN AUX CRIMES ISRAELIENS
Sur le plan de la politique extérieure, le nouveau gouvernement laisse à Macron, c’est à dire aux cercles bourgeois les plus influents sur et dans l’appareil d’Etat, toute latitude pour mener la politique la plus conforme à leurs intérêts impérialistes : c’est ce qu’on appelle le « domaine réservé » qui doit échapper à la comédie démocratique parlementaire. Le soutien à Israël a continué de plus belle malgré ses attaques sur le Liban et la promesse de Macron au « peuple libanais » de faire en sorte que le pays ne soit pas frappé. Les forces françaises ont ouvertement participé à la défense d’Israël face à l’Iran, officialisant ainsi l’existence d’une alliance militaire de fait contre ce dernier pays. Joe Biden a déclaré le 2/10 après concertation avec les dirigeants du G7 (les 7 plus grands pays « occidentaux ») : « nous sommes tous d’accord que les Israéliens ont le droit de riposter ». Une « source diplomatique » française, citée de façon anonyme par le Monde avoue que « l’idée circule que, peut-être, les Israéliens nous emmènent vers un moment historique, que c’est le début de la fin pour le régime iranien. […] Au fond cela arrange [la France] qu’Israël tape sur le Hezbollah » (1). Voilà qui suffit à caractériser les déclarations pour un arrêt de l’envoi d’armes destinées à la guerre à Gaza et pour un cessez-le-feu : de la poudre aux yeux servant à camoufler les appétits impérialistes français dans la région et le soutien indéfectible à l’agresseur israélien : les victimes des guerres ne comptent pour rien.
LE NOUVEAU FRONT POPULAIRE : GESTICULATIONS PARLEMENTAIRES ET CRETINISME DEMOCRATIQUE EN SOUTIEN A L’ORDRE BOURGEOIS
Les partis du NFP ont dénoncé la nomination d’un premier ministre appartenant à un parti qui n’a obtenu qu’un peu plus de 5% des voix comme un déni de la démocratie. La France Insoumise a engagé un risible processus parlementaire de destitution de Macron et le NFP a déposé une motion de censure contre le gouvernement. Ils savent que ces initiatives n’ont aucune chance d’aboutir, mais il faut faire croire aux électeurs, et aux prolétaires en général, que le parlement offre des possibilités d’action et que les élections ne sont pas une fumisterie : si ce n’est pas lors des élections législatives passées, ce sera lors de la prochaine élection présidentielle qu’il sera possible de changer enfin les choses et de mettre fin aux attaques bourgeoises. Leurs grotesques gesticulations parlementaires ont pour fonction de maintenir la crédibilité de la voie électorale pour obtenir satisfaction sur les revendications, comme l’abrogation de la réforme des retraites, l’augmentation des salaires, etc. – alors que les luttes syndicales ont échoué. Ils jouent ainsi un rôle irremplaçable dans le maintien de l’ordre bourgeois en détournant les prolétaires de la seule voie non illusoire : celle de la lutte de classe véritable.
La formation express du « Nouveau Front Populaire » et sa campagne contre le RN ont montré la persistance et l’efficacité des illusions électorales : un taux d’abstention en hausse alors qu’il était régulièrement en baisse à chaque élection, démontrant que de plus en plus d’électeurs, surtout prolétariens, se détournaient du cirque électoral, et un vote massif pour des candidats de droite dans le cadre du « front républicain ». Ce soutien électoral du NFP (y compris des organisations d’« extrême gauche » comme le NPA de Besancenot ou le POI qui ont intégré ce front) aux partis macronien et de droite (qui rend absurdes leurs gémissements sur le nouveau gouvernement) est la traduction sur ce plan de leur soutien en général à l’ordre bourgeois contre les prolétaires.
Il en va de même des organisations syndicales collaborationnistes qui après avoir soutenu le NFP ont repris comme si de rien n’était le chemin de la concertation avec le nouveau gouvernement : la journée de mobilisation organisée le premier octobre par l’Intersyndicale n’allait pas au-delà des rituelles manifestations-soupapes de sécurité qui détournent les travailleurs de la lutte (c’est le but recherché).
Les attaques et les mesures anti-ouvrières dictées par les difficultés du capitalisme français et la crise économique menaçante, provoqueront inévitablement des réactions prolétariennes. Les bourgeois le savent, c’est pourquoi ils se tournent vers des politiques droitières autoritaires ; les valets réformistes le sentent, c’est pourquoi ils se préparent à jouer une fois encore les pompiers sociaux et à faire miroiter leurs alternatives démocratiques.
Les prolétaires d’avant-garde devront s’employer à détourner leurs frères de classe de toutes les impasses, y compris présentées par de prétendus révolutionnaires, pour promouvoir des orientations de lutte authentiquement classistes, anticapitalistes.
Ce ne sera ni facile ni immédiat, mais il n’y a pas d’autre voie.
(1) cf. Le Monde, 4/10/2024. L’impérialisme français voudrait préserver ses intérêts au Liban, mais sans gêner Israël : d’où ses initiatives diplomatiques et ses déclarations impuissantes.
Parti Communiste International
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