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Prises
de position - |
8 mars
Avec la guerre impérialiste à l’horizon, les prolétaires femmes et hommes doivent se préparer au retour de leur lutte de classe
Il y a 110 ans, le 6 mars 1915, la Troisième Conférence des femmes socialistes se tenait à Berne. Il s’agissait, depuis le début du siècle dernier, d’une réunion régulière de femmes militantes issues des principaux partis socialistes européens dont le but était de promouvoir la lutte des femmes prolétaires dans les domaines où elles avaient le plus grand poids social. Partant des conditions particulièrement difficiles que le régime bourgeois leur imposait (et leur impose toujours), les militantes socialistes arboraient 1es drapeaux qui, tant sur le plan des luttes économiques que des revendications politiques, devaient pousser les prolétaires à sortir du bourbier dans lequel le monde capitaliste les plongeait et à prendre toute leur place dans la lutte de classe.
En 1915, la Première Guerre impérialiste mondiale faisait déjà rage depuis un an. Les principaux partis sociaux-démocrates français et allemand, avaient scellé un pacte sacré de collaboration avec leurs bourgeoisies nationales respectives pour la défense de la patrie en danger, et toute fraternisation entre eux avait été préventivement écartée. Alors que les tendances internationalistes au sein du mouvement socialiste, qui allaient bientôt donner naissance aux conférences de Zimmerwald (1915) et Kienthal (1916), étaient encore relativement étouffées par l’impact du traumatisme provoqué par la trahison des directions politiques et syndicales au profit de leurs bourgeoisies nationales respectives, ce sont les femmes socialistes qui, les premières, de manière confuse mais résolue, ont rompu avec la discipline nationaliste dominante dans leurs organisations pour participer à la conférence de Berne. Ce fut le premier exemple de la survie des principes internationalistes fondamentaux dans un secteur déterminé de la social-démocratie et, avec lui, la première possibilité d’ouvrir la voie à un retour des thèses marxistes en faveur de la lutte révolutionnaire contre la guerre impérialiste et pour la défaite du pouvoir bourgeois. Ainsi se terminait leur appel aux femmes travailleuses du monde entier (« Femmes du prolétariat. Où sont vos maris ? Où sont vos fils ? ») :
« L’Humanité tout entière fixe son regard sur vous, femmes du prolétariat des pays belligérants. Devenez les héroïnes, les sauveurs !
Unissez-vous ! que votre volonté soit une ! que votre action soit une ! Ce que vos maris et vos fils ne peuvent exprimer, c’est à vous de le dire, de le redire et de le redire encore :
Les travailleurs de tous les pays sont frères. Ce n’est que leur volonté unie qui peut mettre fin à l’assassinat des peuples.
Seul le Socialisme est la paix future de l’Humanité.
A bas le capitalisme, qui sacrifie des hécatombes d’êtres humains à la richesse et au pouvoir des classes possédantes !
A bas la guerre ! par et pour le socialisme ! »
En 1917, seulement deux ans plus tard, ce sont les femmes prolétaires de la Russie tsariste qui ont fait le premier pas dans cette direction : le 8 mars (selon le calendrier julien) à Petrograd, une manifestation pour l’augmentation des rations de pain – drastiquement réduites en raison des pénuries causées par la guerre – déclencha les premières révoltes qui aboutirent à la Révolution de Février. Comme on le sait, le mouvement des femmes prolétaires fut le début du premier acte de la véritable révolution prolétarienne : celle d’Octobre 1917, au cours de laquelle les bolcheviks menèrent les masses ouvrières et paysannes (dont une grande partie avait été enrôlée pour la guerre) à la prise du pouvoir et à l’établissement de la dictature du prolétariat en Russie, qui, selon les bolcheviks eux-mêmes, devait être le prélude à la révolution mondiale.
Plus d’un siècle plus tard, la guerre impérialiste ressurgit à l’horizon, et elle ne semble plus si lointaine. La grande crise capitaliste de 2008-2013 n’a pas seulement entraîné une chute brutale des conditions de vie du prolétariat, elle a aussi révélé les difficultés des grandes puissances impérialistes à maintenir leur système de partage du monde, leur pillage systématique mais relativement organisé des ressources, des routes commerciales, des richesses, etc. Même si, pour l’instant, cela se produit à distance et par procuration, comme en Ukraine, en partie au Moyen-Orient et en Afrique, ces dernières années ont montré une tendance inexorable à la confrontation entre ces puissances, et la réalité est que les tambours de guerre résonnent de plus en plus fort partout.
Tant la guerre elle-même que la période qui la précédera et qui sera marquée par la mobilisation massive de ressources pour le conflit (depuis les armes aux soldats, les milliards investis dans l’équipement militaire,les travailleurs relocalisés vers les « industries essentielles »), exerceront une pression croissante sur les prolétaires, dont leurs conditions de vie et de travail se détérioreront systématiquement. Les soi-disant « acquis sociaux », qui ne sont en réalité que des concessions temporaires accordées par la bourgeoisie pour garantir la paix sociale grâce aux surprofits obtenus de de la production marchande, seront les premiers à disparaître. Avec eux, disparaîtra aussi le système que l'on croît aujourd’hui immuable et dans lequel les grandes masses de prolétaires des pays capitalistes super-développés ont confiance pour éviter une vie aussi misérable que celle de leurs frères et sœurs dans les anciennes colonies et le soi-disant « Tiers-Monde ». Tant la guerre que ses préparatifs seront une lente mais inévitable démonstration que le capitalisme ne peut offrir que misère et destruction, et que les apparences de paix et de stabilité n’auront été qu’un mirage.
Même pendant les décennies d’expansion économique et de paix relative (relative, car cette paix n’a concerné que les pays les plus développés, tandis que dans la périphérie capitaliste, la guerre a été une constante), la femme prolétaire est restée dans une position subordonnée par rapport à l’homme prolétaire. À la situation caractéristique de sans-réserve, de simple force de travail dont on peut se passer, dans laquelle elle se trouve par son appartenance à la classe prolétarienne, s'ajoute la situation d'oppression particulière qu'elle subit du fait de son sexe. Elle a toujours supporté le poids des pressions familiales, des soins du foyer, des enfants... les emplois moins bien rémunérés et les pires conditions de travail, en plus de la série d'humiliations et de harcèlements qu’elle subit dans la société bourgeoise parce qu'elle est une femme.
Cette situation ne peut que s'aggraver au fur et à mesure que la situation sociale générale se rapproche du précipice de la guerre où toutes les oppressions seront redoublées. Prétendument dépassée, cette situation représente un avantage économique ou politique pour la bourgeoisie, et pour cela elle ne pourra que ressurgir ; et la femme prolétaire ne pourra que souffrir encore une fois et encore plus de la réalité exacerbée du monde capitaliste. Elle sera appelée à subir une oppression accrue au nom de l'unité nationale, de la défense de la patrie, du front uni avec les femmes bourgeoises (qui sera sans doute recouvert du manteau de la solidarité féministe ou d'un autre slogan de ce genre), et la prétendue « liberté » et les « droits acquis » serviront d'argument pour la faire participer activement à cette défense des intérêts de la classe bourgeoise.
La guerre mettra le prolétariat, et en particulier les femmes prolétaires, face à une alternative brutale : combattre pour leurs intérêts de classe ou mourir. La mobilisation militaire exercera une pression telle sur la classe ouvrière qu’elle n’aura pas d’autre choix que de revenir sur le terrain de la lutte de classe, de la défense intransigeante de ses propres intérêts, en utilisant des moyens et des méthodes exclusivement classistes, donc sans aucune alliance avec la bourgeoisie petite, moyenne ou grande, pour empêcher la classe bourgeoise de détruire leur vie et de les transformer, elles et leurs enfants, en chair à canon sur les fronts de la guerre et dans les entreprises.
Les femmes prolétaires ont une longue tradition de lutte, même si elles l’ignorent peut-être. De la Commune de 1871 à Petrograd en 1917, en passant par les grandes organisations syndicales et politiques de classe, elles ont démontré leur force révolutionnaire, une force qu’elles utiliseront à nouveau quand la situation historique l’exigera. Lorsque la bourgeoisie, comme ces dernières années en Ukraine, en Russie et en Israël, désignera à nouveau les fronts de guerre comme le destin inéluctable du prolétariat, les femmes prolétaires devront prouver une fois encore et sans l’ombre d’un doute, qu’elles sont les héritières de la plus grande tradition de lutte de l’histoire : celle de la classe prolétarienne. Jusque-là, les femmes prolétaires continueront à lutter, aux côtés des hommes prolétaires et avec leur soutien, pour exiger de vivre dignement, pour défendre leurs droits les plus fondamentaux et spécifiques – maternité, enfance, travail de nuit, etc. – et pour mener des luttes économiques, en défendant les salaires, les conditions de travail et la sécurité sur les lieux de travail.
Vive le 8 mars prolétarien !
Vive la Journée internationale de lutte des femmes !
Pour la reprise de la lutte de classe !
6 mars 2025
Parti Communiste International
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