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La révolte des masses prolétarisées arabes a atteint la Syrie: le régime répond par des massacres!

 

 

Le président Bachar El-Assad s’est lourdement trompé s’il pensait arrêter les manifestations de protestation en usant du bâton et de la carotte; ni la répression policière, ni l’annonce de réformes n’ont suffit à briser le mouvement.

Les accusations selon lesquelles des puissances étrangères incitent et dirigent les mouvements contre le régime baasiste des El-Assad pourraient bien n’être pas dénuées de fondement, à la différence de la propagande d’un Kadafhi prétendant qu’ Al Quaïda organise la révolte en Libye. Ce n’est pas d’aujourd’hui que l’impérialisme américain, en liaison avec les aspirations d’Israël à dominer la région, essaye de trouver des points d’appui dans l’opposition en Syrie. Mais la situation actuelle dans toute l’aire nord-africaine et moyen-orientale n’est évidemment pas le résultat de manoeuvres des impérialistes américains, anglais, français ou israéliens. C’est la crise économique, précipitant les larges masses dans une misère terrible, conjuguée à une insupportable oppression policière et dictatoriale, qui a causé l’aggravation des tensions jusqu’à provoquer les explosions dans toute la région.

Pendant des dizaines d’années, les régimes autoritaires en place ont maintenu l’ordre capitaliste et, au delà de leurs alliances opposées, assuré le contrôle impérialiste de cette zone troublée, par la répression brutale de toute contestation et de toute lutte interne.

Les fractions bourgeoises qui, en Tunisie, en Egypte, en Libye, prennent la relève des fractions liées aux Ben Ali, Moubarak et Kadhafi, récoltent inévitablement les fruits d’une révolte qui a éveillé les plus larges masses à une activité sociale et politique qui leur était complètement interdite il y a quelques mois encore.

 Inévitablement, parce que le mouvement de révolte des prolétaires et des masses prolétarisées de ces pays n’a pas eu à sa tête ni le parti communiste révolutionnaire, ni même des partis et organisations immédiates structurées selon les principes de la démocratie bourgeoise. Le parti communiste révolutionnaire n’existe pas aujourd’hui sinon sous une forme embryonnaire privée de toute influence (et nous sommes convaincus de représenter cet embryon); en outre, sans la reprise de la lutte de classe prolétarienne, il serait impossible au parti de prendre la tête du mouvement social et de modifier les rapports de forces entre le prolétariat et la bourgeoisie. Deux éléments essentiels sont nécessaires pour la formation du parti de classe, communiste donc international: la restauration de la théorie marxiste, falsifiée et détruite par le stalinisme et ses héritiers, qui a été accomplie par la Gauche Communiste dans le second après-guerre; et la reprise à grande échelle de la lutte prolétarienne organisée, qui tarde toujours mais qui réapparaîtra inévitablement étant donné les attaques que le capitalisme mondial, en proie à des difficultés croissantes, inflige aux prolétaires, les obligeant à se défendre y compris pour les revendications élémentaires de vie et de travail. Ce sont précisément ces attaques qui sont à la base des luttes sociales dans les pays arabes et qui font qu’aucun pays n’en est à l’abri.

 

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Un vieux dicton de la diplomatie internationale disait qu’au Moyen-Orient on ne fait pas la guerre sans l’Egypte et on ne fait pas la paix sans la Syrie. Cela signifie que la Syrie, de par son histoire, sa position géographique et ses caractéristiques multiconfessionnelles, joue un rôle important dans les équilibres régionaux. La Syrie n’a pas beaucoup de pétrole ni de gaz, elle n’a pas de matières premières précieuses pour l’économie capitaliste internationale ; mais elle a une importance stratégique : la stabilité politique et sociale de la Syrie contribue au contrôle des agitations sociales, politiques et militaires au Moyen-Orient, alors que son instabilité accroît les risques d’instabilité dans toute la région. Les Etats-Unis et les autres impérialismes occidentaux, qui critiquent ses liens avec l’Iran, sont bien conscients de sa valeur stratégique ; l’extension du mouvement de protestations parti de Deraa aux  plus grandes villes du pays et même à Damas, risquant de se transformer en révolte à la libyenne, répand l’alarme dans les chancelleries impérialistes. Les avertissements lancés à plusieurs reprises par Obama à Bachar el Assad d’arrêter la répression contre des manifestants pacifiques peut difficilement être suivi de décisions semblables à celles prises à l’encontre de Kadhafi. L’intervention militaire en Libye s’enlise actuellement dans un siège qui ne laisse rien présager de bon pour les populations civiles qui vont continuer à tomber sous les coups des troupes de Kadhafi ou des «frappes amies». C’est pourquoi les impérialismes occidentaux ne seraient finalement pas si mécontents de voir le régime Baathiste mener sa sanglante répression contre les masses et la paix des cimetières s’installer en Syrie. En un certain sens l’impérialisme américain qu finance à coups de millions de dollars l’opposition syrienne, aurait même tout avantage à laisser un régime détesté par son peuple se salir les mains : la « démocratie occidentale » y gagnerait en prestige et légitimité…

Quoi qu’il en soit,  il n’y a pas de doute qu’en Syrie l’ordre établi, représenté depuis 45 ans par le régime dictatorial des El Assad, sera défendu avec férocité. Si le massacre des civils a toujours été une arme des pouvoirs dictatoriaux, il est également bon pour l’impérialisme, « ami » ou « ennemi », que les rébellions soient contenues et que le talon de fer de l’Etat maintienne les masses dans la domination.

Aujourd’hui ce n’est pas le prolétariat qui est à l’avant-garde du mouvement social en Syrie ; il semble même qu’il reste relativement en marge des protestations dont les protagonistes sont  les couches de la  petite et moyenne bourgeoisie recueillant le soutien des masses paysannes. Cela n’empêche pas, qu’outre les revendications de démocratie, de lutte contre la corruption et les privilèges du clan au pouvoir, de suppression de la loi d’urgence, des tribunaux spéciaux et de libération des prisonniers, sont également apparues des revendications d’augmentation des salaires, d’institution d’un revenu minimum pour les chômeurs, de baisse des taxes, de liberté d’organisation et de manifestation : toutes revendications qui intéressent directement les prolétaires.

La répression violente des manifestations du 15 mars a été suivie par la répression encore plus violente des manifestations du 22 avril : au moins 70 morts, des centaines de blessés et d’arrestations. Le grand mot d’ordre des manifestations où protestent ensemble Arabes et Kurdes, musulmans et chrétiens est : changement démocratique ! Comme en Tunisie, en Egypte, en Libye et ailleurs, la spontanéité généreuse des masses ouvre la voie aux grandes illusions de la démocratie bourgeoise. Mais le changement démocratique en Tunisie et en Egypte a déjà démontré que rien ne va réellement changer pour les masses prolétarisées ; quand elles demandent que ce changement aille plus loin que ne veulent les nouveaux dirigeants, elles se heurtent à la violence répressive. La répression sera peut-être un peu moins féroce , la police aura peut-être un peu moins «  les mains libres », la corruption sera peut-être un peu moins présente, mais les prolétaires et les paysans pauvres continueront à se tuer au travail quand ils en trouvent, toujours menacés par la faim, le chômage et la misère.

La seule voie pour sortir des griffes du système économique et politique existant n’est pas celle des élections libres, de l’Assemblée constituante, d’un système judiciaire indépendant ; ni celle d’un nationalisme populaire où les différences entre les classes seraient confondues dans un mélange utile seulement à la classe bourgeoise dirigeante ; elle commence par la reconnaissance de l’antagonisme irréconciliable entre classes laborieuses et classes possédantes, entre prolétaires et propriétaires des moyens de production, des ressources minières, de la terre et de façon générale de la richesse sociale produite par le travail salarié.

La seule voie est celle de la lutte de classe contre toutes les oppressions, qu’elles soient salariale, nationale, religieuse, raciale, sexuelle, contre toutes les répressions. Elle passe par l’organisation indépendante de la lutte ouvrière sur le plan de la défense immédiate, par la solidarité prolétarienne de classe, par la constitution du parti prolétarien, le parti communiste révolutionnaire.

Toutes les autres alternatives, démocratiques, populaires ou religieuses, ne peuvent aboutir à autre chose qu’au maintien de la domination de la bourgeoisie et du capitalisme.

 

 

Parti Communiste International

22 avril 2011

www.pcint.org

 

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