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Prises de position - Prese di posizione - Toma de posición - Statements                        


 

Belgique

Après le succès de la grève générale, les syndicats abandonnent les revendications à la table des négociations

 

 

Le 13 février dernier la Belgique a connu une importante grève générale. Suite aux tentatives de négociations entamées entre les bureaucraties syndicales et les organisations patronales, le front commun syndical a affirmé rejeter la marge très faible d’augmentation des salaires et la flexibilité démesurée proposées par les capitalistes. Ainsi que le refus patronal de discuter des conditions des emplois fins de carrières ou des prépensions. 

Les patrons affirmaient qu’il n’existe qu’une marge salariale « disponible » de 0,8%... sur deux ans! A l’heure où les factures explosent!  En période de croissance économique et de profit plantureux pour les entreprises! Alors que les cotisations patronales ont diminué et que l’impôt des sociétés a été réduit ...

Les organisations syndicales ont donc avancé plusieurs mots d’ordre: une augmentation significative de nos salaires, une augmentation du salaire minimum à 14€/heure ou 2.300€/mois, moins de pression et un travail faisable, plus de contrats à durée indéterminée et un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle, une pension minimum de 1.500€ net, une fin de carrière en douceur via le maintien des régimes de prépension et des emplois de fins de carrières à partir de 55 ans, le relèvement des allocations sociales de 10% au-dessus du seuil de pauvreté, l’égalité salariale « À travail égal, salaire égal ! », le renforcement des services publics, des factures de biens et services essentiels (eaux, gaz, électricité) raisonnables, une plus grande justice fiscale qui déplacera la pression fiscale des épaules les plus faibles vers les plus fortunés, le capital et les grandes entreprises, etcétéra...

Ces revendications immédiates étant populaires au sein du prolétariat, il était évident que la grève nationale allait être particulièrement bien suivie. «Rarement une action a pu compter sur une telle compréhension», titrait le quotidien De Standaard.

L’entièreté des secteurs furent touchés. Des métallurgistes aux travailleurs de la pétrochimie en passant par les salariés des grands magasins (comme Carrefour qui a connu le licenciement de 1.200 personnes en 2018), de la poste, des transports publics, des ports et aéroports, du marchand et du non marchand, des services et de la production, du privé et du public, des banques et assurances (par ex. AXA qui sort d’une restructuration qui a touché 650 personnes). 

Terrible constat: quatre années de gouvernement libéral/nationaliste, ce sont 160.000 personnes qui dépendent des banques alimentaires : la charité pour se nourrir !

Soulignons que cette grève générale a eu lieu dans le cadre de l’AIP. Tous les deux ans, les organisations patronales et syndicales au sein du «Groupe des 10 » négocient un nouvel Accord Inter-Professionnel, plus connu en tant qu’AIP. C’est un accord intersectoriel qui, d’une part, détermine la norme salariale pour les deux années à venir, et d’autre part, reprend une série de dispositions en matière de conditions de travail, formation, congés, etc.

 

Projet d’accord

 

Fin février, on nous apprend que les « partenaires sociaux » sont parvenus à un projet d'accord après près de 20 heures de discussions.

Quelques légères augmentations touchent les prestations sociales. L’intervention patronale dans les frais de déplacement est revue légèrement à la hausse. On constate aussi les premiers reculs.

Afin d’éviter les licenciements secs, les entreprises en restructuration peuvent accorder des prépensions dès l’âge de 56 ans. Dorénavant, pour les entreprises en difficultés l'âge de la prépension a été rehaussé et passera de 56 à 58 ans cette année, 59 ans en 2020 et 60 ans fin 2020.

Concernant les fins de carrière, il est encore possible pendant deux ans et demi d'accéder à la prépension à 59 ans pour les longues carrières et les métiers lourds. Ensuite, on passe à 60 ans en 2021.

 

Et le pognon?

 

Dans La lettre au bureau fédéral de la Fédération générale du travail de Belgique (syndicat de tendance « socialiste ») du 26/02, Miranda Ulens et Robert Vertenueil, (Secrétaire générale et Président) bombent ridiculement le torse: « Dans un contexte politique particulièrement difficile, nous sommes quand même parvenus à obtenir quelques avancées sociales pour les travailleurs. Certainement au niveau du pouvoir d’achat. Grâce à notre pression et à la grève que nous avons organisée, nous sommes parvenus à relever la marge de 0 8% à 1,1% de la masse salariale »...

Concernant le salaire minimum (9,85€), il a été augmenté de 1,1%, soit 10 centimes de l’heure, très largement en deçà des 14€ avancés par le front commun syndical.

Le carcan de l‘austérité capitaliste est donc en fait avalisé par les syndicats ;

Pourtant, Marie-Hélène Ska, secrétaire générale de la Confédération des Syndicats Chrétiens se réjouit au micro de la radio La 1ère du 27 février: « C’est la première fois en 10 ans que l’on remet à l’agenda la question du salaire minimum. C’est un signal important »... dix cents, quoi !

 

Satisfaction patronale

 

La Centrale générale des syndicats libéraux de Belgique défend complètement l’accord. Un soutien intéressant pour Pieter Timmermans, administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB), patron des patrons, qui s’est enjoué: « Cet AIP est un bon accord et une bonne chose pour la stabilité socio-économique de notre pays. » 

Le ministre de l'Emploi, Kris Peeters, n'a pas caché sa satisfaction: «Nous accueillons l'accord de manière positive», estimant que cela pouvait «éviter le chaos en Belgique». Rien que ça!  

Pour « l’opposition », cette gauche résignée et aveulie qui n’a même plus la velléité de poser au défenseur des travailleurs, Frédéric Daerden, député PS, interviewé par Bel-RTL estime: «En Belgique, il y a encore moyen d’avoir une concertation sociale»... 

 

La « concertation sociale » mène immanquablement à la défaite

 

Les leçons à tirer de ce nouvel épisode de trahison sont claires : les journées de grève y compris les plus puissantes, si elles restent sans lendemain et si les travailleurs laissent la direction de la lutte  aux professionnels de la collaboration avec les patrons et l’Etat bourgeois, n’aboutissent à rien. Preuve est à nouveau faite que les mobilisations légalistes et pacifistes organisées par les syndicats collaborationnistes ne débouchent que sur la défaite et  la démoralisation. Pour se défendre il n’y a pas d’autre voie que d’abandonner cette pratique de la «concertation sociale», de ne pas avoir peur de semer « le chaos » comme le redoutent les bourgeois, c’est-à-dire de briser la paix sociale qui ne profite qu’aux patrons. Bourgeois et prolétaires, patrons et travailleurs ne sont pas des partenaires qui peuvent trouver un bon « accord » entre eux : ce sont des ennemis de classe dont les intérêts sont irréconciliables. Ceux qui affirment le contraire ne sont que des vendus aux patrons, des défenseurs de l’ordre capitaliste, même et surtout quand ils prétendent défendre les travailleurs. Seule la lutte de classe ouverte peut permettre de faire reculer la classe ennemie, de lui arracher des concessions significatives, avant de pouvoir la renverser, elle et tout son système d’exploitation et de répression.

Les premiers pas dans cette voie sont la rupture avec les orientations et les pratiques de collaboration de classe suivies par le front commun syndical, le retour à la défense exclusive des intérêts prolétariens, l’adoption des méthodes et des moyens classistes de lutte : les travailleurs devront prendre leurs luttes en main en s’organisant pour cela, afin de ne pas les laisser entre les mains des appareils syndicaux traîtres !

 

 

Parti Communiste International

3 mars 2019

www.pcint.org

 

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